Christophe Maé - C'est drôle la vie © Fabien Vieilletoile
Christophe Maé - C'est drôle la vie © Fabien Vieilletoile

Christophe Maé en interview ‘sans filtre’ : “Je suis un éternel gamin, donc je continue de rêver éveillé”

Il vient tout juste de dévoiler son septième album studio baptisé C’est drôle la vie. Christophe Maé est de retour dans les bacs après 4 ans d’absence et il se livre dans une interview ‘sans filtre’ bourrée de passion dévorante pour aficia.

C’est dans le Sud de la France que Christophe Maé a démarré l’écriture de son nouvel album C’est drôle la vie porté par le single Des Pays des merveilles”. Il y redessine les contours de son territoire et signe un album solaire.

C’est drôle la vie, oui, parce qu’il y a de sacrées anecdotes dans cet album, des rencontres inattendues, des duos imprévus, et beaucoup de passion. C’est finalement à São Vicente, l’une des îles de l’archipel du Cap-Vert, que Christophe Maé a terminé l’enregistrement de cet album. L’artiste se confie ‘sans filtre’ en interview pour aficia sur cette confection très personnelle et passionnante.

L’interview ‘sans filtre’ de Christophe Maé :

Bonjour Christophe Maé. Tu aurais pu choisir Tahiti, La Nouvelle Zélande, non… tu as choisis le Cap-Vert pour enregistrer ce nouvel album, pourquoi ? 

Tout simplement parce que j’écoutais de la musique depuis chez moi, dans le Sud de la France, comme tous les matins. C’est comme ça que je démarre ma journée. J’écoute un mix de Cesària Évora. J’entends une voix, celle de Suzanie Pierece qui va me hanter, qui ne va pas me lâcher. Donc à un moment donné, je me suis renseigné sur elle. À ce moment-là, je n’avais aucune connexion au Cap-Vert. Je me renseigne à droite, à gauche, et j’arrive à choper le numéro de téléphone d’un gars, qui s’appelle José Da Silva, qui est entre autres  le producteur de Césaria Evora. 

C’est incroyable ! Il y a une suite à cela j’imagine ? 

Lorsque je l’ai au téléphone, il me dit qu’il l’a connait bien, qu’elle vit bien sur l’île de Sao Vicente, elle fait des concerts, elle ne fait que ça. Les semaines sont passées, et j’ai fini par aller au Cap-Vert, je suis allé à sa rencontre. Ça a matché immédiatement. On a fait de la musique ensemble, et j’ai fini par composer “Des Pays des merveilles” qui devient le single phare de l’album C’est drôle la vie

Cette histoire a presque démarré de rien au final ?

C’est presque toujours ça. Tu sais, moi je suis en quête d’un truc, d’émerveillement, d’étonnement, et le fait d’aller à la rencontre d’une nouvelle culture, d’un endroit que je ne connaissais pas… Il y a juste la musicalité de Cesaria Evora que j’écoutais en boucle. Mais comme plein d’autres artistes. Cette voix m’a appelé. J’ai débarqué là-bas. Cela aurait pu ne pas marcher. Et ça s’est plutôt bien passé. Elle raconte juste une chose, qu’elle a grandi loin du luxe, de tout ça, et qu’il lui manquait certes pas mal de choses, mais qu’elle avait de l’amour à gogo à revendre. Il y a quelque chose qui m’a frappé, et j’ai écrit ce truc là, “Des Pays des merveilles”. 

Christophe Maé – C’est drôle la vie © Fabien Vieilletoile

De façon générale, comment t’es-tu senti au Cap-Vert pendant l’enregistrement de ce disque ?

Quand on est là-bas, on a les pieds au Brésil. Dans la manière de parler, le créole capverdien… Ça sonne quoi ! La musicalité, c’est tout ce que j’aime. J’ai un pied dans l’Afrique. Depuis mon tout premier album, j’ai toujours eu un pied sur le continent africain, que ce soit dans les rythmiques, le côté très organique des instruments… C’est pour ça que le Cap-Vert, c’est le fil rouge de cet album. J’ai utilisé des instruments qui dominent. C’est un petit accordéon, une petite guitare nylon, une contrebasse, des percussions… et ça c’est la couleur de l’album ! Pour moi, c’est encore une fois une invitation au voyage. Dans cette musique là, il y a ce côté solaire qui me représente aussi ! 

Tu parlais d’étonnement, d’émerveillement avant… Est-ce que cela passe aussi par le renouvellement de sa propre musique ? 

Se renouveler… je ne suis pas de là à me dire qu’il faut que je me renouvelle, et je ne vais pas renouveler la musique non plus. Moi je fais ce que je sais faire, avec ce que je peux, à travers des influences. Je vais piocher des choses qui me parlent au moment où je vais le faire. Là, c’est sa voix qui m’amène là-bas. J’ai une chance folle d’avoir avec moi des musiciens de jazz, des gars que j’ai croisés sur la route depuis une vingtaine d’années. 

Quel a été ton processus de travail pour ce projet d’ailleurs ? 

Je suis chez moi, je compose guitare-voix, je fais de la chanson française, et après au retour de ça, je vais chercher ces musiciens qui sont mes amis, ma famille musicale et qui donne cette couleur. J’ai avec moi un saxophoniste de jazz qui depuis une dizaine d’années, un musicien trompettiste de jazz également. Ces gens-là donnent une couleur unique. Je suis un fan de musiciens de jazz. C’est juste un plaisir de rentrer en studio avec ces musiciens là !

Aujourd’hui, j’ai une chance folle d’avoir auprès de moi mes parents et mes gamins

Christophe Maé – aficia

Quels sont les grands thèmes qu’on retrouve dans cet album ?

 Je parle du temps qui passe, des choses essentielles, de l’urgence de vivre, des transmissions. Je parle de vérité, de ma vérité, de prendre conscience des choses essentielles de la vie, des choses importantes. Au moment où je dis ça, je pense à une chanson qui s’appelle “Trop jeune” où je dis “Trop vieux pour être jeune,trop jeune pour être vieux” et “dans une main mes parents, dans l’autre mes gamins / entre ce temps qui fout ce coup et celui qui vient”.

Découvrez “Trop jeune” , le dernier clip de Christophe Maé :

C’est très nostalgique…

C’est une nostalgie joyeuse pour moi. Ce n’est pas éternel. Aujourd’hui, j’ai une chance folle d’avoir auprès de moi mes parents et mes gamins. Je mets le doigt sur quelque chose qui peut paraître banal, mais qui est à mon sens profond. C’est mon moteur de vie aujourd’hui. C’est ma famille. Ce n’est pas juste pour la carte postale, c’est une vérité. Et quand je parle de moi, je parle de l’autre également. Car c’est commun à tous. Quand je vais chercher un thème personnel comme ça, je sais que c’est universel. On mène tous les mêmes vies. 

Il y a quelque chose qui te tient particulièrement à cœur aujourd’hui ?

Oui, c’est de réconforter les gens qui m’apprécient, qui viennent me voir d’une tournée à l’autre, c’est de leur parler. C’est sans aucun doute l’un des albums les plus autobiographiques que j’ai pu faire. C’est à travers ces chansons là, ces textes là, que je parle à des gens qui me ressemblent dans tous les cas, qui partagent les mêmes valeurs. Je veux créer du lien entre les gens, ça me tient particulièrement à cœur. Pour preuve, l’année dernière, j’ai fait 120 concerts. Je joue devant 400 ou 500.000 personnes si je cumule les festivals. Les gens viennent de divers horizons, qui ne se parleraient même pas à la base mais là, pendant deux heures, on traverse les mêmes émotions. Pour la simple et bonne raison que j’ai l’impression qu’on vit d’une certaine manière les mêmes vies.  

J’ai trouvé cet album très varié en termes de musicalité. On passe de “L’amour”, un titre hyper énergique à “Les bougies” qui est une magnifique ballade. Comment fais-tu ces choix ?

Écoute, sincèrement, quand je compose, je me projette sur la scène. C’est vrai que je suis en quête de ça. Je sais que tel morceau sera pour ma partie acoustique. Quand je la valide, je sais que “Les bougies” sera une chanson pour ma partie acoustique. Encore une fois, je parle de moi, de profiter de la fragilité de notre existence. C’est con, mais c’est tellement vrai. Ce truc-là, ça part d’un délire. J’en ai fait une chanson. 

Comme quoi c’est drôle la vie, il y a 20 ans j’ai chanté cette chanson dans les pianos-bars, et 20 ans plus tard, ils sont avec moi sur cet album que j’ai composé…

Christophe Maé – aficia

Un souvenir en particulier qui t’a fait écrire cette chanson ?

Depuis une quinzaine d’années, l’été je pars en vacances, je vais à un endroit, en l’occurrence en Corse. Le premier jour de mes vacances, je vais bruler un cierge. Et à ce moment-là, je me dis “Pourvu que ça dure” en prenant conscience de la chance qu’on a d’être là. “Les bougies” est un piano qui me tient à coeur, avec piano-voix, contrebasse, avec un petit clin d’œil au gospel à la fin, mais sans exagérer parce que ça ne s’y prêtait pas. J’aurai peut-être l’occasion de le décliner différemment sur scène !   

Peux-tu me parler du titre “Comment on s’aime” : un hymne à l’amour qui est selon moi l’un des plus forts de l’album…

Mais l’hymne à l’amour Valentin, excuse moi, mais c’est l’Amour, tout simplement, chanter en duo avec Amadou & Mariam. Il y a une raison pour laquelle je les ai sollicités et qu’ils sont sur l’album. 

Dis-moi tout !

Il y a une vingtaine d’années, je chantais “Je pense à toi mon amour”, un de leur titre phare en piano- bar, en terrasse. Mon album s’appelle C’est drôle la vie, 20 ans après, je les sollicite parce que je trouve une mélodie, leur mélodie. Je les appelle et comme quoi c’est drôle la vie, il y a 20 ans je l’ai chanté dans les pianos-bars, et 20 ans plus tard ils sont avec moi sur cet album que j’ai composé. Ils étaient à Bamako et ils m’ont dit de leur envoyer la chanson. Si ça le fait, on pose nos voix. Cela s’est fait très naturellement. Je suis tellement fier de créer du lien. Ils sont du Mali à Bamako… C’est trop beau !

Au-delà de l’immense joie de collaborer avec eux, quel est le message que tu souhaites véhiculer  ?

 Cette chanson, c’est un peu un pansement qui va aller se poser sur plein de gens car je parle de l’amour qui te met dans tous ces états, portée par ces voix qui traversent le temps dans les refrains. Amadou & Mariam, c’est la puissance tranquille. Ils traversent le temps. Ils s’aiment comme au premier jour. La symbolique était tellement belle pour moi. 

Il y a un titre qui évoque ton incroyable relation amoureuse avec ta femme. Peux-tu m’en parler ?

Christophe Maé – C’est drôle la vie

Il s’agit de “Comme avant”. Pour mon histoire personnelle, c’est 20 ans de vie commune avec ma femme. Elle m’aidait à porter mes enceintes quand je finissais mes concerts en piano-bar à l’époque. On a fait la route ensemble, c’est elle qui me porte. C’est elle qui a révélé une force que j’ignorais. Elle a toujours été là. Elle y croyait plus que moi je crois. Un jour je lui dis “Viens, j’ai trouvé un appartement pour Paris, j’ai vraiment besoin d’y aller, faut que je fasse des premières parties, j’ai besoin d’être vu !”.

À aucun moment, elle n’a douté ?

Elle n’a jamais hésité, elle m’a toujours suivi. Et encore, ce n’était même pas un appartement, c’était une chambre de bonne, un 10m2 avec les toilettes sur les paliers. Mais on était déjà les plus heureux. Chanter “Comme avant”, l’histoire d’un couple, ce n’est pas gagné, c’est au quotidien, c’est savoir faire des concessions. Sans que ce soit une lutte, sinon autant vivre seul. Tout ça, c’est grâce à elle…

Est-ce qu’elle t’as donné quelques conseils sur ton album ?

Oui, bien sûr. C’est sûr qu’elle est forcément impliquée, elle met un pied dans le studio de temps en temps. C’est une des seules à pouvoir me dire “J’aime pas !” Mais en général, quand elle met le doute sur quelque chose, c’est que je doute profondément. On est en phase. C’est ma force, mon socle. 

Si je devais conclure cet échange, est-ce que Christophe Maé n’est pas finalement cet homme, cet artiste qui a compris que le monde n’avait pas de frontières et qui propose sans cesse des hymnes à l’amour, à la tolérance et à l’être humain ?

Tu sais quoi, il n’y a rien de plus qui peut me faire plaisir. Tu as écouté mon album comme moi je le pense. La diversité, c’est une force, j’en suis convaincu, c’est loin d’être un obstacle. Et avoir les meilleurs musiciens du monde, avoir un pied sur le continent africain, avec des gens qui rayonnent à l’international et qui traversent le temps. Je parle de longévité, et qui est profondément humaniste. C’est ce qui me touche. C’est toujours délicat d’aborder des thèmes comme l’amour, comme si, comme ça, parce qu’il y a un côté où je fais de la variété française et j’ai envie de dire que je fais de la chanson française sophistiquée, et je l’assume pleinement.

N’est-ce pas grâce, en partie, à ces collaborations qui font partie intégrante du projet ?

Oui, j’ai eu une main au Bénin avec Angélique Kidjo, ou au Mali avec Amadou & Mariam, ou au Cap-Vert avec Ceuzany, une nana pas connue qui a une voix de dingue et une énergie de malade. Elle me fait l’honneur d’accepter mon invitation à me suivre sur toute la tournée. D’ailleurs, elle sera à mes côtés et elle emmène avec elle des copines qui sont dans un groupe de huit nanas, et qui jouent des percussions. Il y a un côté très hypnotique. C’est de la trance. Il y a une partie du Cap-Vert qui va venir sur les routes de France. C’est juste incroyable. 

Dernière question sur laquelle je me dois de rebondir, est-ce qu’il a une envie de jouer au-delà du territoire français avec cet album à dimension internationale ?

Écoute, j’ai déjà la chance de jouer en Belgique, en Suisse, je vais certainement aller jouer au Canada à nouveau, un endroit que j’adore. Après, moi j’ai les bras ouverts. Je suis un éternel gamin, je rêve. Donc je continue de rêver éveillé. Si ça m’emmène ailleurs, j’irai, bien sûr !

Découvrez l’album C’est drôle la vie de Christophe Maé :