Ikiigai - DR

Ikiigai en interview “Faire de la musique c’est une manière pour moi de trouver ma place et d’exprimer ce que je ressens”

Exclusivité aficia

À la découverte de Ikiigai et de son univers. Voici le programme de cette belle rencontre avec un artiste qu’il faut suivre en cette année 2021. Un coup de cœur de la rédac’ d’aficia.

Ikiigai… C’est le nom d’un jeune artiste né à Hong Kong et élevé à Shanghai. Auteur, compositeur, interprète, il est un véritable touche à tout qui nous plonge dans un univers très bien construit, naviguant, comme il l’avoue lui-même, entre souffrance et solitude.

Mais la solitude et la tristesse n’enlève rien à la qualité de ses productions, très largement ancrées, notamment pour le côté visuel, par la Chine où il a grandi jusqu’à ses 18 ans.

Avec notre interview, on vous laisse découvrir l’univers d’un artiste que l’on vous recommande vivement de suivre. Une plongée abyssale dans le monde d’Ikiigai et vous allez forcément succomber !

Ikiigai : l’interview…

Pour commencer, comment te présenter rapidement au public qui te découvre aujourd’hui sur nos pages ?

Salut, c’est Ikiigai mais appelle moi ‘Ikii’. Je suis un artiste qui met ‘Souffrance’ et ‘Solitude’ au cœur de mes textes et je m’inspire de plusieurs styles pour créer un mélange de mélodie. Alors oui, j’écris des chansons carrément tristes mais en vrai je peux être drôle 😀. Ah et la petite info en plus : je suis né en Chine et j’y ai vécu jusqu’à mes 18 ans.

Tu es auteur, compositeur, interprète, multi-instrumentiste… Un véritable touche à tout. Comment as-tu fait l’apprentissage de la musique ?

J’ai commencé à apprendre le piano quand j’avais 5, 6 ans. Mais la méthode chinoise, très stricte, me faisait carrément perdre l’envie de jouer. On me tapait les mains quand je les positionnais mal et on me donnait un paquet de chewing-gum quand je jouais bien…

Je me suis mis au saxophone vers 14 ans pour jouer des morceaux plus Jazz, plus ‘sexy’. 2 ans plus tard, je me suis retrouvé chanteur dans un groupe et après avoir fait le talent show du lycée avec des reprises de “Street Sweeper Social Club” et “The Dandy Warhols” on s’est lancé dans la compo.

C’était assez improbable mais un des profs de techno connaissait des gens dans le monde de la musique sur Shanghai et il nous a permis de nous produire sur scène. Donc de nos 16 à 18 ans, on jouait presque tous les mois dans des bars à Shanghai, c’était incroyable.

J’ai aussi appris la guitare et la batterie via mes potes et YouTube car, en répète, on s’amusait à s’échanger nos instruments. On jouait de 8 à10 heures par semaine…

Après le Bac c’était la déprime, on vivait tous dans des villes différentes et puis la musique n’était pas une priorité…

J’ai mis du temps à comprendre que je pouvais faire tout de chez moi et puis un jour je me suis acheté ma première carte son et mon premier micro. Et c’est à ce moment que ma chambre est devenue un studio avec un lit 😀. Je joue toujours avec mes potes quand on se voit par contre, c’est trop cool et ils me soutiennent vachement dans mon projet solo.

Si la musique te fait voyager alors, pour moi, c’est réussi, peu importe la langue.

Ikiigai

Tu as grandi entre Hong-Kong et Shanghai. Cette culture influence forcément ton art. De quelle manière ?

Oui clairement ça fait partie de mon identité, autant de temps en Asie ça influence forcément, je ne mange pas de pain mais du riz blanc deux fois par jour 😀. J’ai bien évidemment grandi avec les Animés, la différence de culture et un rapport un peu différent à la vie comme on pourrait avoir en Europe.

Je parle couramment le Mandarin et ça fait longtemps que je veux écrire des textes dans cette langue. Je travaille sur quelque chose avec un artiste qui s’appelle Cumulus. On n’entend pas vraiment ce genre de son en France, j’ai hâte de vous montrer ça et de voir les retours, c’est différent.

Tu chantes aussi bien en français qu’en anglais. Pourquoi ne pas avoir fait un choix tranché comme peuvent le faire souvent les artistes entre l’une ou l’autre de ses langues ?

Je commence toujours par la mélodie car c’est dans l’instrumental que je me retrouve le plus. Si la musique te fait voyager alors, pour moi, c’est réussi, peu importe la langue.

Il y a des sons que j’écoute en Cantonnais et je ne comprends rien aux paroles 😀 pourtant je ressens l’émotion et ça me transporte tout aussi bien.

En Chine, je n’ai pas vraiment grandi avec la musique Française et je parlais Anglais et Mandarin pratiquement tous les jours, écrire dans cette langue venait plus naturellement pour moi. C’est une fois installé à Paris qu’on m’a dit que c’était dommage de se limiter, j’ai donc suivi ce conseil.

Je ne pensais pas sortir de morceaux sur les plateformes car j’avais trop peur.

Ikiigai

Tu arrives dans le paysage musical français en mai 2020 avec le titre “Bad Dreams”. Pourquoi avoir fait le choix de ce titre pour te présenter au public ?

Pour être honnête, c’est arrivé un peu par hasard. Je ne pensais pas sortir de morceaux sur les plateformes car j’avais trop peur. Vraiment. C’était la peur de me dire que je rendais le projet officiel et que les gens allaient enfin écouter quelque chose de concret. D’ailleurs j’ai toujours peur 😀.

Un jour, Teva Baumann, que je ne connaissais pas, m’a contacté par Insta. On s’est très bien entendu et j’ai beaucoup aimé ce qu’il m’a fait écouter. Je pense que j’aurais eu beaucoup de mal à sortir quoi que ce soit s’il ne m’avait pas proposé ce projet et il y avait aussi cette ‘obligation’ de terminer le son car je m’engageais auprès de lui. Il fait partie de mon parcours et on va refaire des choses ensemble.

Personnellement, depuis tout petit je ne dors pas bien la nuit et je fais tout le temps des cauchemars. La mélodie m’a donné envie d’exprimer ce sentiment de solitude, pas du tout liée au Covid, et d’impuissance face aux rêves. Tu te retrouves à avoir peur au milieu de la nuit et tu es tout seul, ça fait peur… Quand j’ai envoyé le premier jet à Teva ça a tout de suite matché.

Depuis tu as publié 6 autres titres. On navigue dans un univers qui semble osciller entre la musique urbaine, la pop, mais également des voluptes électro. Comment définirais- tu définirais ton univers ?

Ahh cette question est trop difficile ! À vrai dire, je suis encore dans cette ‘recherche’, idéalement quelqu’un trouvera le terme parfait pour moi 😀.

Mais pour essayer de te répondre : c’est un univers qui mélange différents styles, c’est vraiment une extension de moi. Je ne peux pas dire que ce soit du Rap ou juste de la Pop. On m’a plusieurs fois conseillé de me caser dans un style plus défini, que ça marcherait mieux comme ça et que les gens s’y identifiaient plus facilement…. Mais je n’ai pas envie de faire ça. Je veux faire un mix aussi bien de mélodies douces, de basses 808, de voix pitchées avec des paroles tristes et si je veux y mettre un riff de Métal je le ferai. J’aimerais me dire que lorsqu’on écoute mes chansons, on se dit que “ça c’est du Ikiigai” 😀.

Il y a aussi une forme de mélancolie dans ton univers. Je me trompe ? Et si c’est bien le cas, qu’exprime tu avec cette mélancolie ?

Alors oui carrément, tu ne te trompes pas, on baigne dans de la mélancolie. L’autre jour on riait justement avec un ami parce que toutes les playlists dans lesquelles je retrouve mes sons ont des noms tels que ‘Sad Mood’ et ‘Déprime’ 😀. En vrai je comprends et ça ne me dérange pas du tout ! Ce n’est pas que les chansons funs ne m ‘attirent pas, c’est juste que je ne sais pas faire…

Mon univers provient d’une enfance assez marquante et le sentiment de solitude donc le mood et la vibe vont avec. Faire de la musique c’est une manière pour moi de trouver ma place et d’exprimer ce que je ressens dans l’espoir que quelqu’un puisse aussi s’y identifier. J’évoque à chaque fois des moments authentiques et je pense qu’on a tous des choses qui nous hantent, des moments où on se dit “mais ça n’a pas de sens”, ou bien le fait qu’on ne s’aime pas… C’est beaucoup de choses que je ressens au quotidien, je me dis que, peut-être, certaines personnes se reconnaissent là-dedans et se sentent moins seules en écoutant ce que je fais.

 J’adore jouer en live et proposer des versions un peu différentes de mes morceaux en me laissant toujours une forme d’impro.

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Sept titres depuis l’année dernière. Mais pas d’EP, pas d’album… C’est un choix artistique ? Une manière différente de capter ton public ?

J’ai fait le choix pour 2021 de sortir un son par mois histoire de me mettre dans un certain rythme car sinon je ne sors rien, je laisse les sons traîner dans le disque dur. Vraiment c’est terrible… Ce challenge, très difficile quand à côté on bosse à plein temps à côté, c’est essentiellement pour me motiver mais aussi pour créer chez les auditeurs ‘l’attente du prochain son’. Je pense que ce n’est pas plus mal car ça me permet de tester pleins de choses.

C’est quand même dans tes projets d’offrir un format plus long au public ou ce genre de capsules musicales te semble le meilleur moyen d’exister ?

Pour l’instant je me concentre sur ce projet mais il y a une cohérence dans les messages donc un album ou EP sera probablement quelque chose de cool à faire par la suite mais j’attends encore un peu de voir ce qu’il se passe pour moi.

Aussi, j’adore jouer en live et proposer des versions un peu différentes de mes morceaux en me laissant toujours une forme d’impro. J’ai hâte de pouvoir me produire sur scène et partager ça avec vous.

Il y a un autre axe qui semble important pour toi. Celui du visuel. On le rencontre dans les pochettes de tes singles, dans tes photos de presse, dans les vidéos qui accompagnent tes titres… À quel point l’aspect esthétique est important pour toi et à quel point tu te retrouves impliqué dans cette création visuelle ?

On me demande souvent pourquoi je me mets des traits sur le visage ou d’où cela vient. Je suis un grand fan d’Animés. Ça se voit non ? Je pourrais même dire que lorsque j’étais petit, mais encore maintenant finalement, ces héros qui souffrent tous les uns plus que les autres étaient un peu comme mes amis. Je me sentais moins seul avec Naruto et Princesse Mononoké 😀. C’est aussi comme ça que j’ai créé mon personnage et que j’ai choisi ce nom qui vient du concept Japonais ‘Ikigai’ signifiant : trouver sa raison de vivre, ou son équilibre. J’ai juste ajouté un ‘i’ au milieu pour y mettre ma petite touche perso 😀.

Pour illustrer mes chansons j’aime beaucoup tout ce qui est de l’ordre des AMV, assez pratique quand on n’a pas de clip ! Je trouve que parfois c’est même mieux finalement. Les dessins évoquent tellement d’émotions, des choses qu’on ne pourrait pas représenter dans le monde réel. Ils me représentent bien.

La musique est rarement le fait d’un seul homme… Avec qui travaille tu au quotidien ?

J’écris, je compose et j’enregistre tout depuis ma chambre puis j’envoie le morceau, avec les automations, à mon ami Von Hara qui produit et mix le son. Il fait des retouches, il ajoute des éléments et emmène le son à un autre niveau. À nous deux on y passe tellement de temps, on compte clairement plus les heures ! Aussi, “Tu es là” a été Masterisé par Alexis Bardinet de chez Globe Audio Mastering.

Pour les visuels, en termes de pochettes, je travaille avec un pote. Je lui explique ce que j’ai en tête et c’est lui qui va créer le visuel. Je trouve que c’est assez difficile de trouver les bonnes personnes avec qui travailler, en termes d’univers qui matchent surtout. Ça aide de construire ‘sa famille’ dans la musique.

De même, la musique trouve souvent des sources d’inspirations. Quels artistes, que ce soit du monde de la musique, du cinéma, de la peinture… ont eu l’occasion de t’inspirer d’une manière ou d’une autre ?

J’ai grandi dans une famille qui écoutait beaucoup de Moby, The Cure, Tricky et BB King. Du coup je dirais que ce sont mes bases. Plus tard, je me suis vraiment intéressé au Métal (Slipknot, Protest the Hero, System of a Down).

Ce que j’écoute le plus c’est principalement de la musique instrumentale où j’y trouve beaucoup d’inspirations dans les mélodies complexes et variées. De ce que j’écoute côté Français, c’est vrai que j’aime beaucoup Lomepal et Terrenoire, que je trouve incroyable. Voilà, ça fait beaucoup d’influences différentes 😀 !

Je pense que le combat se fait sur le long-terme et quand je suis découragé je m’inspire souvent d’artistes qui ont réussi.

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Le monde de la musique est de plus en plus embouteillé et le public se retrouve noyé sous une masse de propositions artistiques. Comment faire quand on est un jeune artiste comme toi pour tirer son épingle du jeu ?

Je pense qu’il faut tout d’abord être soi-même et rester constant dans son travail. Ça peut aider d’écouter ce qu’il se passe autour de nous, ce que les plateformes de streaming annoncent comme changement et pouvoir s’adapter.

Je pense que le combat se fait sur le long-terme et quand je suis découragé je m’inspire souvent d’artistes qui ont réussi, je remarque qu’ils s’accrochent comme des fous. Il faut continuer de sortir des choses même si ce n’est pas simple d’être artiste et devoir gérer sa propre communication. Mais j’ai l’impression que les gens veulent toujours découvrir de nouvelles choses, moi le premier, donc il ne faut pas baisser les bras.

D’ailleurs, parler avec aficia me donne l’opportunité de montrer d’où je viens et d’en dire plus, je suis très reconnaissant, merci !

De la même manière, que penses-tu qu’il me manque aujourd’hui pour avoir un peu plus de visibilité ? Quel est ton regard, par exemple, sur les médias spécialisés dans le domaine musical ?

Je pense qu’il ne faut pas négliger l’importance d’être relayés dans des blogs, articles ou même dans des podcasts. Cela permet de susciter une curiosité chez des nouvelles personnes déjà intéressées par la découverte de nouveaux artistes.

Terminons cette rencontre par deux questions… Dans un premier temps, que nous réserve Ikiigai dans les mois à venir ? Des projets, des envies, qui seraient déjà dans les cartons ?

Déjà, si j’arrive à respecter le rythme d’un son par mois je serai hyper content ! On en reparle dans 6 mois ? Je travaille sur pleins de sons dont des collabs et j’ai vraiment envie de les sortir. Donc on peut s’attendre à pas mal de choses différentes… Ce qui est sûr c’est que je ne vais pas m’arrêter, c’est vraiment le début là. Je suis ouvert à beaucoup de propositions.

Et pour finir, aficia aime mettre en avant de nouveaux talents ou des talents émergeants qui méritent un peu plus de lumière… Tu aurais un artiste à mettre en avant, à faire découvrir à nos lecteurs ?

Je trouve ça cool comme question ! J’écoute beaucoup Sage Pee en ce moment D’ailleurs on travaille sur un son ensemble… Il a un univers complètement différent du mien, c’est beaucoup plus Rap mais ça reste mélancolique et on s’entend bien là dessus.

Vous pouvez aussi aller voir un artiste qui s’appelle Mathis il a un son que j’adore “Idwk”, il a déjà presque 100k streams dessus ! On va sûrement faire quelque chose ensemble aussi.

Un dernier mot pour la route ?

Je suis toujours super touché quand je reçois des messages de personnes qui viennent d’écouter mes chansons. Faut surtout pas hésiter à follow sur les réseaux et donner de la force !