L’interview de Luce : ses débuts, ses albums, sa folie ….

C’est à l’occasion de sa tournée qu’aficia a eu l’occasion de rencontrer la remarquable Luce, une jeune artiste haute en couleur, touchante et originale à la fois. Entre concerts et préparation de son troisième album, Luce affine sa musique et explore son univers décalé.

C’est lors de sa participation au célèbre télé-crochet Nouvelle Star (à l’époque sur M6) que Luce s’était faite remarquée. C’est à 19 ans que la jeune perpignanaise avait remporté la compétition. Mais, parfois, les victoires sont plus difficiles que les défaites, et le parcours de Luce n’ a pas été sans quelques interrogations. Elle partage avec nous ses premiers pas dans le monde la musique, son évolution et ses projets à venir.

Luce, l’interview…

Bonjour Luce

Bonjour !

Merci beaucoup de prendre quelques minutes pour nous répondre avant de monter sur scène !

Y’as pas de problème, c’est avec plaisir.

Le public te connaît depuis déjà 6 ans, depuis ta sortie de l’émission Nouvelle Star et depuis ton 1er album Première phalange. Est-ce que tu peux nous parler de cette période, de ton début de carrière ?

Pour moi, le 1er album, ça a été extrêmement compliqué, comme la sortie de Nouvelle Star. Parce que c’était nouveau, parce que ce n’était absolument pas dans mes projets et surtout parce que je ne me sentais pas du tout légitime. J’ai vraiment eu un gros problème à la sortie de l’album par ce que je me disais : « Je suis en train de prendre la place de quelqu’un qui a vraiment envie de faire ça… » ou « Qu’est-ce que j’ai à dire ? Est-ce que j’ai vraiment envie de monter sur scène ? » C’était de vraies questions que je me suis posées… Ça a été douloureux pour moi, la sortie du 1er album, et compliqué à aborder en média ! Aujourd’hui, je me le permets, parce que c’est passé maintenant. Mais je pense qu’à l’époque, les gens n’auraient pas compris pourquoi je me posais toutes ces questions. Pour eux, c’était une grande chance (et c’est une grande chance !), sauf qu’à 19 ans, je me suis sentie perdue. Aujourd’hui, à 26 ans, j’assume complétement tout ce que j’ai fait. Je trouve que j’ai fait de très bons choix. Je trouve que je suis assez droite dans mes baskets, je sais ce que je veux. Même à 19 ans je savais ce que je voulais. Je ne voulais pas faire tout et n’importe quoi. Je voulais rester proche de mon univers, et je trouve que ça me correspondait bien. J’ai pas trop merdé, ça va !!! (Rires)

Ensuite, tu as enchaîné avec pas mal de projets, avec un album de comptines pour enfants La fabrique à comptines , et des participations à des albums collectifs, notamment La bande des mots et Des mots pour Alzheimer. Cette période-là est liée à ta forte notoriété du moment, comment est-ce que tu as vécu toutes ces sollicitations ?

Je les ai mal vécu ! (Rires) Genre, la fille qui vit tout mal !!!! (Rires) Nouvel Star est un tremplin, énorme ! On te fait tout un tas de propositions… Comme je suis très entière comme nana, je me disais : « Mais j’ai rien fait en fait, pourquoi on fait appel à moi ? Qu’est-ce que j’ai de plus ? » J’avais l’impression d’être « juste passée à la télé » et que ça déterminait qui j’étais… Alors que moi, avant la Nouvelle Star, j’existais… En tant que personne… Nouvelle Star m’a révélé en tant que Luce et a fait apparaître un engouement pour Luce… Ça me donnait l’impression de n’exister que depuis quelques mois aux yeux des gens… C’est pour ça que je ne l’ai pas bien vécu ! C’était hyper compliqué, j’étais trop jeune. Après, c’était tellement beau ce qui s’est passé… Aujourd’hui, sans Nouvelle Star, je ne chanterais pas… C’est tellement énorme ce que ça m’a apporté ! Pour Alzheimer, c’est une maladie qui a touché de prêt ma famille, donc c’est une maladie dont je me sens proche. J’ai eu la chance de rencontrer des gens qui m’ont demandé : « Est-ce que vous voulez nous soutenir ? », je ne me suis pas posé de question, à savoir si c’était Luce ou Lucie (ndlr : son vrai prénom) qu’on sollicitait… Là où je me suis posé ces questions, c’est que j’ai eu la chance de tourner pour TF1, pour France 2 et je me suis dit : « Concrètement, on me prend parce que je suis déjà passé à la télé ! ». Y’en a à qui ça passe au-dessus de la tête. Moi, je suis trop entière pour que ça me passe au-dessus de la tête. C’est entre autre pour cela que depuis septembre dernier, j’ai commencé une école de théâtre, pour me sentir plus légitime si un autre projet comme ceux-là se représente. J’aime ce métier, mais ça ne se fait pas en un jour. Ce n’est pas parce que je chante à la télé que les choses vont se débloquer : il faut travailler, il faut que je sois à l’aise avec mes projets. Jusqu’à il y a deux ans, ce n’était pas le cas. J’ai adoré tourner, mais je me suis dit que je ne jouais pas bien… Ce n’est pas bien ce que je fais, mais pourtant, on m’appelle… Ça m’a fait souffrir. J’ai besoin d’être légitime. Je ne veux pas monter sur scène et me dire : « Bon, les gars, c’est bon, ça va passer… Je suis passée à la télé ! » Je ne peux pas vivre comme ça, c’est vraiment pas moi ! J’ai besoin de savoir où je vais, qui je suis et pourquoi je le fais. Aujourd’hui, j’ai les réponses à ces questions. Sans la musique et sans le théâtre, je n’existe pas. Ça met du sens dans ma vie. Je ferai un métier à fibre artistique toute ma vie.  Je deviendrai peut-être couturière de costume pour un théâtre… Mais j’ai besoin d’être dans la création. Nouvelle Star, dans ma vie, ce n’est pas un hasard ! J’ai une bonne étoile qui me suit depuis plus de 6 ans qui m’a fait comprendre que j’avais à faire quelque chose dans le théâtre et dans la musique, et j’ai beaucoup de chance de m’en être rendu compte, parce que tout le monde a un talent, mais quelque fois, on a pas les clefs pour le savoir. Du coup, on n’a pas la chance de briller à tel ou tel moment, et c’est dommage. Moi, j’ai eu de la chance, je m’en suis rendu compte à 20 ans ! Franchement, je n’ai pas perdu de temps ! (Rires)

Parmi tes heureuses rencontres, il y a eu Mathieu Boogaerts, qui a largement participé à ton 2ème album. Il a était très important dans ta quête de légitimité ?

Ma rencontre avec Mathieu s’est effectuée sur le 1er album. On a coécrit « J’me fume » et « Elise ». Il se trouve qu’on ne s’est pas lâché. Il y a eu quelque chose qui s’est passé… Je ne peux pas l’expliquer… C’est une rencontre. J’ai eu une période de creux ; je n’étais plus chez Sony, qui était ma première maison de disque… Je me suis vraiment demander si j’allai continuer de chanter… Pas parce que je n’avais plus de maison de disque… Parce que…. J’aime mon premier album, mais tout ce qui s’est passé autour, ça m’a tellement travaillé que je me suis dit : « Est-ce que j’ai envie de faire de la musique ? » C’est une vraie question que je me suis posée, et la rencontre avec Mathieu…. C’est… Je me sens légitime, je me sens investie. J’ai envie de travailler. Il m’a tellement mise sur un piédestal, à me dire : « Tu chantes hyper bien, c’est juste, ce que tu fais…». On a affiné ensemble un style musical sur cet album. Je me sens plus proche de mon intimité. J’ai l’impression d’être retournée à mon essence, à mon « moi ». Je suis moins dans des artifices, je braille moins. J’ai l’impression d’être un peu plus resserrée, d’être dans une sobriété vachement plus belle et vachement plus sensible. C’est ce que je n’avais pas réussi à trouver sur le 1er album. Mais ce 1er album était tout de même nécessaire pour faire ensuite le 2ème. Et sans Mathieu, je ne sors pas de 2ème album ! Il m’a fait rencontrer ma 2ème maison de disque, Tôt ou Tard, qui est une EXCELLENTE maison de disque, avec des gens supers. Il a travaillé avec moi pendant 2 ans et demi, il m’a accompagné sur scène pendant toute la première partie de la tournée, il m’a appris beaucoup et maintenant je bosse sur mon 3ème album. Mais ce qui est sûr, c’est que sans Mathieu, il n’y aurait pas eu tout ça ! Il est très hypnotique. J’ai l’impression qu’il détient LA vérité ; je bois ses paroles, je me dis toujours qu’il est dans un raisonnement hyper juste. Je pense que je le mets autant sur un piédestal qu’il doit m’y mettre, je pense que l’on se fantasme l’un et l’autre, on s’imagine… Alors qu’on est tellement différents… Je pense que dans la vie, ensemble, ce serait compliqué (Rires). On est souvent pas d’accord, sur plein de choses… Le moment où on ne se pose plus de question, c’est le moment où j’ouvre ma bouche et que lui joue de la guitare et que je chante ses chansons. C’est une vraie rencontre, et je pense qu’il n’y en a pas 15 comme celle-là dans la vie…

Il y a d’autres personnes avec qui tu aimerais travailler ?

C’est en cours… Je ne peux pas encore en parler parce que c’est un peu tôt. On travaille depuis janvier sur des rendez-vous. C’est hyper frais. En tout cas, je ne repartirai pas sur un album hyper fusionnel comme le dernier. Je ne pourrai pas repartir avec une seule personne, en tout cas, pas tout de suite. Ça a été tellement fort que, quand notre tournée s’est arrêtée avec Mathieu, je l’ai mal vécu. Je me suis sentie seule, j’avais l’impression de ne plus être rien, toute seule. C’était assez douloureux. Pour l’instant, il faut que je me reconstruise un peu, en me demandant quelles sont véritablement mes envies. C’est pour ça que cette tournée me fait vachement de bien parce que je suis seule sur scène avec mes musiciens. C’est énergique, pêchu… On n’est plus dans le côté intime du duo de clown qui s’appuie l’un sur l’autre. C’est nécessaire pour voir la suite, que je retourne à mes projets et lui aux siens. Pour mieux se retrouver par la suite. Même sur le 3ème album, il pourrait écrire une ou deux chansons, j’adorerais…  Peut-être que ce ne sera pas sur cet album, mais sur le prochain !

Quelques mots sur la scène, comment tu gères ?

Je pense que c’est la scène qui me gère ! (Rires) J’ai l’impression de ne plus être en mal de quelque chose quand je suis sur scène. Ça devient addictif… À mon grand regret ! J’ai l’impression d’être pleinement moi-même sur scène. C’est très émouvant quand je suis sur scène, y’a vraiment un côté catharsis… Tout s’envole, je ne pense plus à rien, je suis vraiment « collée » aux mots. Je suis connectée avec les gens, certains m’envoient de très bonnes énergies, d’autres moins, mais… On donne ce que l’on a…. Y’a des fois où je donne moins aussi, parce que ce n’est pas ma journée… Ce que je préfère avec la scène, c’est que c’est un moment suspendu, il y a un pont entre moi et les personnes qui sont là. Quand je chante, le temps est au ralenti. Donc, je vieillis moins vite. Et j’ai une ultra-conscience de ce qui se passe. Mais tout ! Ça peut aller d’un papillon qui va se poser sur ma main… Je me dis « Je suis restée un quart d’heure avec ce papillon. » alors que ça a duré une seconde. Une ultra-conscience de ce que je suis et de ce que je partage.

Si tu pouvais choisir la carrière d’un artiste tu choisirais laquelle ?

Moi, j’aime beaucoup Catherine Ringer. En fait, ce que j’aime vraiment, c’est ce qu’elle a créé avec Fred Chichin ; un duo où ils existent eux, en tant que personne. C’est un duo à la vie, à la scène et je trouve ça très fort ! Ils peuvent exister seuls mais, en même temps, il y a un manque. C’est une femme (ça va sembler superficiel, mais ce n’est pas grave) que je trouve terriblement belle. Elle a quelque chose qui m’attire énormément. Dans ces derniers clips, je trouve qu’elle a une élégance rare. C’est une nana qui est dans l’air du temps, qui se construit et se reconstruit. Sa carrière, c’est beaucoup avec Fred Chichin, mais ce n’est pas que ça. C’est là où je la trouve forte et belle, parce qu’elle arrive à être dans autre chose alors que les gens l’ont rangé dans une catégorie. Une carrière que je trouve surprenante. Je n’ai jamais eu la chance de la voir en vraie, mais je la trouve exotique, je la trouve vraiment belle. Je ne peux pas expliquer, elle m’hypnotise. La classe ! Et ce n’est pas tout le monde qui a la classe !

Luce : sa playlist !

Chaque fois que nous rencontrons un artiste, nous lui demandons de partager avec nous ses coups de cœur musicaux du moment. C’est au tour de l’abracadabrante Luce de livrer le contenu de son MP3 à aficia !

Une fois n’est pas coutume, sa playlist ressemble bel et bien à l’artiste : kaléidoscopique ! Entre tubes des années 80 et titres très récents, Luce aime découvrir de nouveaux morceaux inspirés. Parmi ses dernières découvertes, on trouve Nicolas Michaux avec « À la vie, à la mort » ou Dick Annegarn avec son « Vélo va ». En parfaite harmonie avec son propre univers, Luce écoute « The Upsetter » de Metronomy, « Les objets » de Philippe Katerine, qui a le pouvoir de l’hypnotiser ou encore « Le mambo du Décalco » de Richard Gotainer, dont elle adore le clip.

La Playlist exclusive de Luce !

L’interview décalée

Le fact checking – Le vérificateur de fait

On a pu lire qu’il y avait beaucoup de folie chez toi ! Es-tu :

Maniaque ? ULTRA maniaque ! Je fais le ménage, je range… Si tu voyais ma loge… (Rires) Je suis dans un alignement d’objets perpétuel ! Quand ce n’est pas aligné, je fais des crises d’angoisse… C’est très perturbant. C’est une maladie à ce niveau-là !

Schyzo ? Je dirais plutôt cyclothymique… Jamais dans le boulot, mais dans ma vie, c’est un enfer ! Je peux passer du rire aux larmes en 3 minutes !

Mytho ? Non, mais je peux arranger des choses, des situations…

Maso ? Ouais… J’aime bien quand ça fait mal ! Et je me complais dans ce truc, c’est chiant !!! (Rires)

Parano ? Ouais… Je suis ultra parano en fait ! Pas dans le boulot non plus…  Souvent quand j’entends quelque chose ou que je vois quelque chose, je me dis : « Y’a quelqu’un, y’a quelque chose qui se trame… » Au final, ce n’est jamais vrai.. Mais j’ai un côté « On complote contre nous ! » (Rires)

Un objet fétiche ? J’en ai deux ! J’ai ma flûte à bec (j’en ai fait pendant 13 ans) et un autre objet… Je n’ai jamais rencontré mon arrière-grand-père qui s’appelait Lucien et qui jouait de la clarinette dans un orchestre de village. J’ai gardé la clé de l’étui de sa clarinette. Je la porte accrochée à un collier.

Un dernier mot pour les lecteurs d’aficia ?

Un gros merci à vous et à très bientôt j’espère sur la tournée !