Madame Monsieur - © Fifou
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Madame Monsieur en interview : “Collaborer avec d’autres artistes nous permet d’en apprendre plus sur nous”

Exclusivité aficia

À l’occasion du nouvel album Tandem qui paraîtra ce vendredi aficia vous propose une semaine en compagnie de Madame Monsieur. Le duo revient sur cet album de collaborations…

Voilà, c’est ce vendredi 26 juin que le duo Madame Monsieur fera son retour dans le bacs avec l’album Tandem. Un nouvel opus très riche, offrant de très nombreuses collaborations…

Christophe Willem, Slimane, Boulevard des Airs, Soprano, Hatik ou encore Oxmo Puccino, tous répondent présents à l’appel de Madame Monsieur pour offrir un opus très riche et surprenant à la fois. C’est donc en toute logique que nous avons proposé à Madame Monsieur de passer la semaine en votre compagnie !

Tandem, un nouvel album de duos !

Toute la semaine, nous découvrons et redécouvrons Madame Monsieur et parlons de divers sujets ! Après nous avoir confié sa playlist du moment, parlé de son premier livre “Je m’appelle Mercy” et de sujets de société (harcèlement, tolérance…) Madame Monsieur est revenu sur la genèse de ce nouvel album événement, ses histoires en coulisses et ses collaborations avec Slimane, Kyo, Claudio Capéo ou encore Black M.

Madame Monsieur : l’interview…

Vous arrivez avec un album concept, 25 titres 26 artistes. D’où est venue cette idée d’un album uniquement fait de collaborations ? 

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Jean-Karl : Ça fait longtemps qu’on aime faire des collaborations. On a commencé comme ça, notamment avec notre premier EP, où l’on a collaboré avec des artistes issus du rap français. Je pense à Youssoupha, Jok’Air, S.Pri Noir. C’est quelque chose qu’on a toujours aimé faire. Après l’aventure ‘Eurovision’, on avait envie de faire ça en plus grand, en plus gros, et surtout en ouvrant les portes aux artistes de la variété française et de la pop qu’on a eu la chance de rencontrer sur la route au cours de ces deux dernières années, avec qui on s’est super bien entendu et avec qui on avait envie de passer du temps en studio.

Quel a été la nouveauté par rapport à vos précédentes collaborations ?

Jean-Karl : Peut-être celle d’inviter des artistes pop plus que des rappeurs avec qui on avait l’habitude de travailler. Ils ont malgré tout répondu présent et cela a vraiment été génial de réunir des artistes confirmés comme Black M, Soprano, Youssoupha et des artistes de la jeune génération comme Hatik ou Chilla .

Est-ce qu’il n’y a pas là une volonté de casser les codes, de casser l’image qu’on peut se faire des genres, des artistes dans les cases et cela au mépris des étiquettes imposées ?

Jean-Karl : C’est certain que le concept d’étiquettes, c’est quelque chose qu’on a jamais aimé. D’ailleurs, depuis qu’on fait de la musique ensemble, cela a toujours été difficile de nous mettre une étiquette. Cela a même été un problème à notre niveau pendant un moment, on ne savait pas trop qui on était. Mais on s’en foutait, on avait juste envie de faire de la musique. Pour nous, ce n’est pas un rappeur et un chanteur, ce sont des musiciens qui ont du talent, qui s’expriment de façon différentes, dans deux styles différents. Oui bien sûr, c’est ça qu’on a envie de montrer aussi. Ce que je dis souvent, c’est qu’en faisant de la musique, on peut collaborer avec des gens qui ont des origines différentes, des vécus différentes, des expériences différentes. Ce ne sont pas forcément des gens que l’on aurait croisé si on ne faisait pas de la musique. Là, on a pu se respecter, faire de la musique ensemble, avoir du respect et de l’affection ensemble. 

Emilie : Ça va au delà du fait de se rencontrer et passer un moment en studio. Ce qu’on a fait avec cet album c’est 25 chansons. Ces 25 chansons, pour la très grande partie, ce sont des co-écritures. Co-écrire, créer à plusieurs, ça fait partie des choses les plus difficiles, surtout lorsque c’est nouveau, qu’on se connait pas encore bien. Il y a quelque chose de l’ordre de la mise à nu. C’est vraiment intéressant ! Le fait d’oser, de croiser les gens, se réunir dans un moment de création… ça donne des trucs complètement inédits, et que l’on n’aurait pas soupçonné être capable de faire.  

Là, on ne parle pas d’une compilation de reprises de titres existants. Ce sont que des chansons que l’on a écrites en collaborations avec nos invités.

Jean-Karl

Le fait d’écrire à plusieurs mains fait partie des raisons du report de Tandem, initialement prévu en septembre 2019 ?

Emilie : C’est sûr que ça prend du temps. On a collaboré avec des artistes qui sont très demandés, qui ont beaucoup d’actualité, donc forcément à la base, ce n’est pas simple d’obtenir un créneau et du temps. Et encore une fois, ce n’est pas la même chose de venir juste poser sa voix et prendre le temps de parler d’un sujet ensemble en cabine, écrire ensemble et ça, c’est un cadeau. Ce qu’on dit souvent c’est que l’une des choses les plus précieuses dans notre société, c’est le temps. Le fait de donner du temps, le fait de le donner et le partager c’est vraiment précieux.

Jean-Karl : L’autre raison du report de l’album c’est qu’on s’est tout simplement pris au jeu. On avait envie d’inviter d’autres artistes. On s’est dit que finalement, on n’était pas pressé et qu’on avait envie de se faire plaisir en invitant Jérémy Frerot par exemple. On avait envie de faire encore plus.

C’est vrai qu’on a rarement vu un album aussi riche en collaborations…

Jean-Kark : Oui, c’est rare qu’il y ait autant d’artistes, autant de chansons. Surtout sur un projet de chansons originales. Là, on ne parle pas d’une compilation de reprises de titres existants. Ce sont que des chansons que l’on a écrites en collaborations avec nos invités. Personnellement, je ne crois pas avoir déjà vu ça, et c’est une grande fierté !

On parlait d’étiquettes, on parle aussi de collaborations inimaginables. Soprano a invité Marina Kaye, Gims a fait le choix d’avoir Vianney sur l’un de ses morceaux. Cela a toujours été compliqué en France d’associer deux genres musicaux..

Jean-Karl : Mêler la pop à l’urbain, ça fait longtemps que ça existe, depuis les années 90 avec Puff Daddy, c’est justement le moment où la musique urbaine a vraiment pris son ampleur et a commencé à devenir de la pop. Il y a eu Dido et Eminem ensuite… Il y en a plein ! Après, disons qu’en France, ça pose encore des questions. Aux États-Unis, les rappeurs sont au même niveau médiatique que les stars de la pop. Ils sont invités sur les mêmes talks-show, sur les mêmes émissions de télé. Il y a aucune différence. En France, c’est encore compliqué de mélanger.

Par contre, musicalement, le rap est devenu le style musical numéro un dans le Monde et ça inspire tout le monde. C’est donc logique que les artistes de pop aient envie de travailler avec les artistes rap. Pour les rappeurs, c’est aussi une occasion de s’ouvrir un peu, de faire des choses différentes. Ils en sont capables ! On a fait un titre avec Kalash Criminel et ça fonctionne très bien ! Sur le papier, ça peut sonner complètement fou, mais on a réussi à faire un super bon morceau. Chacun reste à sa place tout en se mélangeant. On arrive à faire quelque chose d’unique en fait. 

On parle d’un album complètement fou, unique et audacieux. N’est-ce pas finalement l’album de tous les challenges ?

Jean-Karl : Oh la la ! On compte faire encore plein d’albums après donc je ne sais pas ! En tout cas, c’est un album qui est extrêmement important pour nous. Nous n’aurions pas pu le faire il y a deux ans, c’est sûr. C’était le bon moment de le faire aujourd’hui. On a toujours été ambitieux dans nos choix. On se serait peut-être moins mis en danger en revenant avec un album juste de nous, de chansons, après l’Eurovision. On avait envie de surprendre un peu et de montrer qu’on est multiples, qu’il ne faut pas nous mettre dans une case justement, on aime bien mélanger tout ça et surprendre un peu ! 

Parmi toutes vos collaborations, est-ce qu’il y en a une qui vous a marqué plus qu’une autre ? 

Emilie : Elles sont toutes singulières, c’est sûr ! Quand on y repense, ce sont toutes des expériences uniques. Je sais pas, je réfléchis… J’ai un souvenir fort avec Kyo sur “Les lois de l’attraction”. C’est un groupe qui est en place depuis longtemps, qui se fait respecter et ce qui est fort, c’est qu’ils n’ont jamais re-collaboré avec qui que ce soit depuis leur premier succès “Le chemin” (feat. Sita) en 2002. Ils ont eu une création très intime, très pudique depuis. Le fait de les voir se joindre à nous, d’accepter de jouer le jeu et comprendre à quel point c’était nouveau pour eux, c’était hyper émouvant de les voir faire ça. 

Vous êtes un binôme… Qu’est-ce que cela vous apporte de collaborer avec d’autres artistes ou groupes ?

Jean-Karl : Collaborer avec d’autres artistes nous permet d’en apprendre plus sur nous, c’est-à-dire qu’on a quand même bossé avec des gens qui savent faire des chansons, parfois même des tubes. Cela a été comme une immense master class. On a beaucoup appris. Après eux, ce que ça leur apporte, cela leur a peut-être permis de se libérer, de leur faire du bien car ils ont peut-être fait des choses différentes à d’habitude. Je pense notamment à Claudio Capéo qui est venu en studio sur une chanson un peu plus urbaine et qui s’est éclaté à le faire ! Cet album, c’est un peu notre album de famille ! 

Emilie : Je repense à une anecdote, sur une condition d’enregistrement qui a fallu couplé avec nos agendas respectifs. Le morceau avec Slimane, on l’a composé ensemble. C’est un super auteur compositeur ce qui fait que travailler avec lui est un super moment de partage, de plaisir. On sait où l’on va, on s’amuse ! La seule occasion que nous avons eu pour enregistrer nos voix étaient lors d’un plateau radio en province. On chantait ensemble dans un complexe sportif, je crois, un grand truc. On avait demandé à avoir un accès à une chambre dans un dortoir d’internat. On a branché notre micro. Entre deux chansons, on a couru avec lui pour s’enregistrer dans cette chambre. C’était assez marrant, mais ça fait partie du jeu et des obligations de s’adapter en fait. 

Lord Esperanza ne se fait pas de cadeau à lui-même. J’espère que ce morceau-là donnera de la force.

Émilie

“Terre inconnue”, en duo avec Black M fait office de nouveau single. Pouvez-vous m’en toucher deux mots ? 

Emilie : Black M fait partie des premiers artistes à avoir accepter d’être sur l’album. Pour la petite histoire, nous avons fait deux chansons ensemble. On en a fait une première qui était super, trop bien. On a tellement kiffé enregistrer avec lui, il déborde d’enthousiasme, d’idées… On s’est revu un studio un autre jour, et je sais pas pour quelle raison, nous sommes partis sur un tout autre morceau. C’était “Terre inconnue”. Et là c’était flagrant que c’était lui qu’on voulait ! On a hésité à mettre les deux ! Mais on s’est dit que c’était trop ! C’était un deuxième gros moment en studio. On était comme des gamins d’ailleurs ! Voilà ! 

Qu’avez-vous fait du premier titre du coup, il traîne quelque part ? 

Jean-Karl : Bah oui ! Ce sera peut-être un inédit que l’on mettra sur une réédition ! 

Pour terminer, on va parler des thèmes que vous avez choisies d’aborder. Vous parlez des violences de nuit à l’encontre des filles (”Zéro”), de l’écologie sur “Terre inconnue” la vision de soi avec Slimane… est-ce qu’il y a des thèmes plus compliquées que d’autres à aborder ? 

Emilie : Oh, laisse-moi le temps de réfléchir car il y a beaucoup de chansons ! Qu’est-ce que je pourrais te dire ? Il faudrait que je vois la tracklist sous les yeux ! 

Par exemple, comment s’est déroulée la phase d’écriture du morceau “Zéro” ? C’est un texte qui a coulé de façon fluide ? 

Emilie : C’est marrant parce que c’était à la fois difficile à aborder car il ne fallait pas être dans cliché mais bizarrement, c’est un des textes qui est sorti tout seul car ça parlait un peu d’expériences personnelles, de souvenirs… Tu en parles forcément mieux quand tu as vécu des choses par le passé. J’avais peur que ce soit difficile, et finalement cela a été fluide. Ce qui est marrant, c’est que lorsque nous avions proposé à Lord Esperanza ce sujet, nous avions déjà écrit une partie. Ce qu’on lui avait suggéré, c’était de se positionner en tant qu’homme pour pouvoir parler en tant qu’homme. Et Théodore (de son vrai prénom, ndlr) a dit que ça l’intéressait davantage de se mettre dans la peau de l’agresseur, de ce mec un peu minable. Théo s’est enfermé deux bonnes heures en cabine, et il est reparti avec ce texte qu’on a trouvé hyper fort, hyper juste, très cru. Il ne se fait pas de cadeau à lui-même. J’espère que ce morceau-là donnera de la force à ces nanas quand elles sortent le soir et qu’il fera réfléchir.