Owlle - © gourauphong
Owlle - © gourauphong

Le grand rendez-vous avec Owlle : ‘Skam France’, ‘Emily in Paris’…

Owlle signe une nouvelle fois la musique originale de Skam France, la série à succès de France.tv Slash. Pour l’occasion, aficia lui a posé quelques questions sur ce travail de composer pour l’image…

Après deux albums en anglais, France sorti en 2014 suivi de Heavy Weather 4 ans plus tard, Owlle compose désormais en français. Et ces titres francophones, nous avons le plaisir de les entendre dans des séries. C’est d’abord dans ‘Skam France que l’on découvre son travail. En effet, l’artiste y signe la musique originale de la septième saison, dévoilée entre janvier et mars 2021. “Mirage”, son titre qui apparait dans la scène finale rencontre un succès immédiat. Plus de 600 000 streams sur Spotify et pas loin de 100 000 fois shazamé !

Cette chanson, ainsi que 2 autres (“Sounds Familliar” et “La flemme”), on les retrouve également dans la deuxième saison d’‘Emily in Paris’, où la musique française est nettement mise en valeur. Mais désormais, c’est dans la neuvième saison de ‘Skam France’, actuellement en cours de diffusion, qu’Owlle se distingue. Non pas à l’écran, mais toujours en musique.

À l’occasion de la diffusion de cette nouvelle saison, nous nous sommes entretenus avec Owlle afin d’en savoir un peu plus sur le travail qu’est de composer pour une série…

Owlle : l’interview

Parfois, on dit d’un artiste qu’il a une voix parfaitement taillée pour la comédie musicale, pour le théâtre, les chansons à textes… Toi, en plus de tes projets musicaux personnels, tu as composé pour une série, ‘Skam France’. À quel moment et comment tu te rends compte que ta voix à ce potentiel ?

Il se trouve qu’au départ, on se dit que composer pour une série va plus porter sur la composition pure et dure. Au final, j’ai décidé, ce qui n’est pas toujours une décision évidente, d’ajouter aussi ma voix à ces compositions. Comme ce que je sais faire le mieux, je crois, c’est d’écrire des chansons, alors cela a été naturel pour moi d’accompagner les scènes avec un format chanson et donc d’y mettre ma voix.

J’ai l’impression que si on peut faire des chansons pour soi, alors cela peut très bien s’adapter à peu près à tous les formats. C’est juste que l’on aborde pas la chose exactement pareille. On ne va pas faire une structure pop ou ce genre de chose. On va se laisser un peu plus de liberté et sortir un peu du format. C’est quelque chose qui me plait beaucoup. Cela permet de dézoomer sur ce que nous avons l’habitude de faire avec parfois le carcan de faire des chansons un peu haut format, c’est terrible à dire mais c’est la réalité !

Lorsque tu reçois la proposition de composer pour Skam France, comment réagis-tu ?

Cela s’est fait naturellement et tout en douceur. Je connaissais Tianès Montasser, la personne qui gère les équipes de montage de Skam’, c’est une amie que je connais par le milieu du montage, des clips… Elle m’a fait rencontrer la réalisatrice Shirley Monsarrat et donc elles avaient envie de constituer, avec moi, une équipe de créatives et de femmes autour de cette série. Tout doucement, j’ai pris conscience que c’était un super beau projet. Je me suis penchée dessus car pour être très honnête, je ne connaissais pas du tout Skam. J’ai commencé à découvrir un autre univers et c’est monté crescendo. Jusqu’au moment où je me suis dit que j’étais engagée dans la composition de la musique d’une série et j’ai trouvé ça super intéressant et passionnant. J’ai aussi beaucoup appris parce que c’est une autre manière de travailler.

Justement, j’imagine qu’il y a tout un travail de lecture de scénario en amont pour pouvoir créer au mieux… Au moment où tu acceptes, est-ce que tu as déjà connaissance de l’histoire ou tu y vas plutôt à “l’aveugle” en te disant que de toute façon, tu parviendras à composer ?

Je n’y suis pas totalement allée à l’aveugle. Même si j’avais toute confiance en Shirley la réalisatrice et Tianès la monteuse, j’avais quand même besoin de savoir où je mettais les pieds. Du coup, j’ai eu le brief de départ, ensuite j’ai reçu tous les scénarios. J’ai compris comment cela allait se structurer, de quoi on parlait. C’était assez fou parce que j’avais toute la confidentialité des histoires qui allaient sortir, c’était très beau. Surtout, je n’avais jamais vraiment lu de scénario donc j’étais plongée dedans, j’ai ressenti plein de choses à la lecture. Cela donne tout de suite des idées, des images, le ton que cela va donner.

Et c’est ensuite que j’ai accepté. L’histoire de la saison 7 qui aborde le déni de grossesse était un sujet qui me passionnait vraiment, dans le sens où il m’intriguait beaucoup. C’est un sujet qui m’a toujours fait un peu peur… J’avais envie d’explorer ce sujet, je me suis plongée dedans et c’était super.

Je n’avais jamais vraiment lu de scénario donc j’étais plongée dedans, j’ai ressenti plein de choses à la lecture.

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Owlle : de retour pour la composition musicale de la nouvelle saison de Skam France !

Comme tu l’as récemment annoncé sur les réseaux sociaux, tu repars pour la saison 9 de ‘Skam’. Est-ce que ta façon de travailler a changé depuis la première fois où tu as réalisé ce travail ?

Oui ! J’ai appris entre-temps car il y a eu plusieurs mois de travail sur la saison 7 et 8. J’ai eu des moments un peu difficiles parce que c’est un travail qui peut être, sous certains aspects, assez chronophage. Il faut beaucoup recommencer donc j’avais une peur quant au rapport au temps que cela représente. J’avais quand même mon album à côté donc j’avais peur de ne pas réussir à gérer. Là où je veux en venir en expliquant ça, c’est que j’ai appris surtout à gérer mon temps, à condenser les choses, à savoir comment les aborder.

Aussi pour ce qui est des intentions, la façon dont on aborde la musique à l’image, je me suis adaptée. Au départ j’avais des réflexes et je me suis rendue compte que cela ne fonctionnait pas forcément, même si je pense que j’ai des intentions qui sont toujours très cinématographiques dans ma musique, dans le sens où ça va toujours avec de l’image. C’est ce que je fais sur mes chansons donc ça allait mais il y avait quand même des fois ou j’étais carrément à côté de la plaque. Sur la nouvelle saison, j’ai eu l’impression d’avoir la main plus facile sur certains sujets.

Est-ce que composer autour d’une histoire comme pour Skam France revient au même en termes de création que de composer pour quelqu’un d’autre ? Au final, pour ces deux cas, on en revient à s’inspirer de l’histoire de l’autre intégralement et non de la sienne non ?

Oui tu as raison, c’est vrai qu’il y a quelque chose de commun car on s’imprègne d’une histoire. Mais parfois quand j’écris pour moi, je ne raconte pas toujours mes propres histoires. Alors ce n’est pas tout le temps, mais ça peut être une inspiration d’un film, de quelque chose que j’ai vu, entendu ou d’une émotion que je n’ai jamais ressenti mais que du coup, je fantasme alors je vais la raconter. La seule différence c’est que sur une série on peut exprimer des choses qu’à travers la musique si cela nous chante, sans mauvais jeu de mot (rires) alors que pour un artiste, on va globalement devoir mettre des mots. Ce n’est pas totalement éloigné mais il y a des petites différences. Mais encore une fois, on reste dans une approche qui est de servir l’émotion de quelqu’un d’autre.

Malgré tout, est-ce qu’à certains moments, tu as puisé dans ton histoire personnelle pour créer ?

Oui, sur la saison 7, je me suis pas mal retrouvée dans le personnage de Tiph. Je n’ai jamais vécu de déni de grossesse mais c’est quelque chose dont j’ai toujours eu peur. Pour toutes les craintes qu’elle a et ce qu’elle découvre au fur et à mesure, c’est vrai que je suis allée puiser dans ce que moi j’aurais pu ressentir dans cette situation.
En revanche sur la saison 9, et là vu qu’on se parle maintenant, je ne peux pas te raconter la suite, on va laisser les skamers découvrir, mais ce que je peux juste dire, c’est que je me suis totalement retrouvée dans les personnages et je suis vraiment allée chercher mes émotions pour accompagner la tristesse de l’épisode en question…

Est-ce que ce travail de composition pour une série est un travail auquel tous les artistes peuvent se pencher selon toi ?

Je pense que tous les artistes peuvent le faire. Après il y a des sensibilités qui vont mieux s’accorder avec l’image et qui vont savoir s’adapter. Cela sera alors plus simple pour ces personnes. Mais je pense que l’on a tous cette capacité. Et même d’ailleurs des non-musiciens peuvent accompagner de l’image. Notamment par de l’intuition, quelques notes car parfois il y a quelque chose de très minimal dans la composition à l’image. On peut rester sur quelque chose de très simple, juste des ambiances. J’ai l’impression que c’est toute une question de sensibilité. Alors évidemment au bout d’un moment il faut qu’on apporte de la musique. Personnellement je vais vraiment puiser sur des petits détails, des fréquences. Quand on aime le cinéma, on s’habitue à entendre des choses. Alors on comprend comment cela fonctionne quand on se penche dessus. Comme tout, on peut tous y arriver mais il faut vraiment aimer le faire pour arriver au bout.

Si je suis franche avec moi-même, en vrai, je rêve de pouvoir un jour être un personnage dans la fiction

Owlle
Composer pour le septième art, cela te donne envie d’être dans la peau d’un personnage à l’écran cette fois ? Ou peut-être de toucher à la scénographie, univers dans lequel tu t’es formée ? 

C’est vrai que dans mon parcours artistique, quand j’étais aux beaux arts, j’ai touché très rapidement à la vidéo. C’est quelque chose qui m’a toujours plu, le montage ect. Donc cela m’a permis d’apprendre les rouages de tout ça. Mais si je suis franche avec moi-même, en vrai, je rêve de pouvoir un jour être un personnage dans la fiction. Je pense aussi que lorsque l’on fait mon métier, être sur scène ect, il y a déjà cette volonté d’être dans la peau de quelqu’un d’autre qui existe en nous.

C’est quelque chose qui se ressent à travers tes clips aussi…

Oui c’est ça, c’est quelque chose qui me plaît, d’être à l’écran. Alors bizarrement j’ai plus de mal à parler frontalement devant une caméra, d’être moi-même mais par contre, être face à une caméra et jouer quelque chose, j’adore ça. Alors est-ce que je pourrais être capable et être une bonne actrice, je n’en sais rien du tout, il faudrait que je puisse l’essayer pour le savoir. Mais je pense qu’il y a une base qui est là et qui me donne envie.

On peut dire la même chose pour tout ce qui touche à la réalisation non ?

Oui, c’est aussi quelque chose qui me plaît. Dans mes clips c’est ce que je fais, je suis toujours aux manettes avec le ou la réal et parfois je le réalise seule. Je me rends compte que je passe vraiment beaucoup de temps quand j’ai écrit mes chansons, à écrire des mood, avec des images, de ce que pourrait être le clip de chacune de ces chansons. Malheureusement ça reste souvent des notes parce qu’on ne peut pas tout clipper. Ça représente beaucoup de moyens de faire des clips aujourd’hui, même si on peut en faire certain. C’est quelque chose qui me passionne. Finalement, ça se retrouve dans tout ce que j’actionne aujourd’hui dans ma vie artistique.

Tu évoquais la communauté Skam tout à l’heure, est-ce que cette série a pu t’apporter un nouveau public, peut-être dans une tranche d’âge plus jeune aussi ?

Complètement. Un public plus jeune même si je pense que jusqu’ici j’avais un public qui restait relativement dans une tranche d’âge jeune. Mais c’est vrai que forcément, Skam vient toucher la sortie de l’adolescence voir de l’adolescence même donc ce n’est plus forcément mon créneau à ce moment-là. J’ai reçu beaucoup de messages d’un public jeune mais en même temps très mature. Un public très heureux de découvrir une musique à laquelle il ne serait pas forcément allé écouter spontanément. Cela a été une vraie chance d’intégrer Skam aussi pour toute la lumière que ça apporte autour.

La série Skam France, mais pas seulement…

En parlant de lumière, il y a également plusieurs de tes titres qui apparaissent dans la série à succès Emily in Paris, c’est en quelque sorte une façon de pouvoir faire voyager ta musique aussi non ?

Oh oui, ça c’est pareil, c’était un vrai cadeau de fin d’année. Je ne m’attendais pas du tout à ce qu’il y ait trois titres dans la saison 2 de ‘Emily in Paris’. Effectivement, moi qui ai fait 2 albums en anglais et le troisième qui va bientôt sortir mais qui va être en français cette fois, quelque part c’est que j’avais déjà l’envie que ma musique voyage comme tu dis. Alors c’est drôle de se dire que finalement le français me fait voyager aussi. Mais clairement, j’ai envie de faire des concerts partout. C’est sur que l’on est pas dans la période la plus adéquate pour ça mais il n’empêche que la musique, je la fais pour qu’elle passe partout.

C’est une très belle opportunité pour moi. Cela reconnecte avec mes premières expériences sur mon premier album où j’avais commencé directement sur l’étranger. J’ai joué en Angleterre, un peu partout donc ça reconnecte avec mon histoire.

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