Sylvain Duthu, l’un des chanteurs du groupe Boulevard des Airs s’octroie une petite pause solo avec l’album puissant 15h22. Il en parle sans détour et avec beaucoup de passion sur aficia.
Si son nom ne vous dit rien, sa voix, elle, est cependant très connue du public. Sylvain Duthu est d’ailleurs l’une des voix et l’un des membres historiques de Boulevard Des Airs. L’artiste a des envies de carrière solo depuis plusieurs années et c’est un évènement dramatique qui va l’inciter à se lancer pour de bon. En effet, il a été victime d’un grave accident de la circulation avec sa femme. De ce fait, Sylvain Duthu a alors eu besoin de se réfugier dans l’écriture pour laisser cette douloureuse épreuve derrière lui. Est ainsi né 15h22 dont il va revenir au cours d’une interview sans filtre…
Sylvain Duthu est ‘sans filtre’ :
Bonjour Sylvain. Il y a le succès que l’on connaît avec Boulevard des Airs. Te sentais-tu attendu en solo ou à l’inverse, avais-tu peur d’arriver en solo ?
Je ne me suis pas senti attendu. pas du tout. J’étais le premier surpris à faire ça. C’est pourquoi les gens ne pouvaient pas s’attendre à ce que je fasse quelque chose. Non, j’ai travaillé dans un premier temps un peu en sous-marin. Je ne le dis à personne. Il n’y avait pas de stress de ce côté-là. Et est-ce que j’avais peur ? Pas du tout non plus. Il n’y avait pas de stratégie dans cet album là. Je ne me suis rien dit du tout. Je me suis juste dit que j’avais envie de faire un album tout seul, car il y avait des chansons que je ne pouvais pas écrire dans un autre contexte. Donc je vais le faire ! Je me le suis vraiment dit, et peu importe la critique.
C’était plus un besoin qu’autre chose alors?
Oui, c‘est ça. À un moment donné, dans une période un peu délicate, je me suis lancé là-dedans. C’est comme ça que je pouvais me sauver moi-même. Je suis allé au bout de l’idée, au bout du projet. À aucun moment, je me suis dit “comment ça va être reçu par le gens”.
Quand on est l’un des groupes actuels les plus populaires, dit-on que c’est comme tout recommencer à zéro ou une simple continuité logique ?
J’ai vraiment eu la sensation de repartir à zéro. J’ai vraiment tout changé. On a passé 10 ans avec Boulevard des Airs chez Columbia / Sony Music. Je voulais justement changer de maison. On avait un manager et attaché de presse mais je voulais changer d’équipe. Je voulais que tout soit différent, et que les deux projets soient bien cloisonnés dans ma tête et dans la structure. À partir de là, c’était un départ à zéro et c’est vraiment comme ça que je le ressens encore aujourd’hui.
C’est comme ça qu’il faut le voir d’ailleurs, car je sens bien que cela n’a rien à voir avec Boulevard des Airs qui a une résonance immense car le nom est connu et il y a 20 ans de carrière. J’arrive comme si j’avais 17 ans, je fais du porte à porte (Sourire). Même chez moi à Tarbes, à Biarritz, j’arrive en leur disant “Je viens de sortir un truc en solo, allez écouter”. Ouai, j’ai vraiment la sensation de repartir à zéro ! Ce n’est pas source de frustration, bien au contraire, c’est un choix.
Cette sensation d’être quasiment personne, c’est une sensation que tu retrouves quand il s’agit de te (re) présenter aux médias et au public qui te (re)découvre ?
Oui, c’est sûr. C’est un long travail qui s’appelle être du développement donc c’est forcément un peu long d’installer un projet et un nom. C’est un travail de longue haleine. Mais mon label Tôt ou Tard est là pour m’accompagner dans cette démarche,et mon tourneur aussi. Je dirais que j’ai un petit avantage par rapport à un jeune de 17 ans, c’est que j’ai croisé beaucoup de médias en 20 ans, beaucoup de programmateurs de radios, de TV, en presse. Forcément, j’ai gardé quelques contacts et certains se souviennent de moi. C’est un vrai plus, il faut le dire !
Penses-tu qu’un auditeur est légitime de critiquer cet album étant donné qu’il s’agit d’un album extrêmement personnel et intime ?
C’est intéressant, car j’étais avec un artiste récemment qui me faisait écouter son album. On était plein de copains. Et il y a une chanson qui était extrêmement personnelle pour laquelle je lui ai dit que c’était très beau. Un de ses proches lui a dit que c’était trop intime, trop personnel. C’est à ce moment-là que je me suis rendu compte qu’il y avait vraiment deux types d’oreilles, deux perceptions différentes. C’est ce qui m’interroge sur le fait que des personnes pourraient passer à côté de 15h22 car c’est peut-être trop intime, trop perso, trop pudique aussi. Je peux comprendre. C’est ce qui me touche le plus, c’est quand ça touche à l’intime. Et ça dépend. Je ne pouvais pas écrire autrement en tout cas.
C’est un exercice difficile de mettre sa vie, son journal intime en chansons ?
Non, franchement non. Encore une fois, je n’avais pas d’attente quelconque. Je me suis pas dit “tiens, cette chanson va plaire plus qu’une autre, les gens vont peut-être la trouver intime”. Je n’ai pas fait de pari là-dessus. J’ai ouvert les vannes, tout a coulé et une fois que les chansons sortent, elles peuvent être écoutées. Je suis complètement impuissant là-dessus.
À l’écoute du projet, on ressent le mariage parfait entre chansons à texte puissantes et productions hyper millimétrées et très entraînantes.C’est aussi ça la magie de Sylvain Duthu ?
Oui, c’est ça… je crois… (hésitant, ndlr) au vu de tout ce que j’ai pu faire, dans tous les domaines possibles, c’est vrai. C’est un peu le fruit du savant et du populaire. C’est un sujet qui me passionne. C’est aussi un bouquin. Je me suis toujours posé entre ces deux chaises. J’ai toujours voulu être exigeant, dans les mots, dans la musique. Je viens d’un milieu populaire. Ce qui m’a bercé, ce sont aussi les chansons qui passaient 10 fois par jour à la radio. Je viens de tout ça.
À quel point c’est une prise de tête de mettre des mots forts sur des mélodies entrainantes, et comment trouver le juste milieu ?
Aucune réflexion, vraiment ! Le jour où on écrit “13 décembre” par exemple, je suis dans le métro, je tape les paroles sur mon téléphone. J’écris un gros pavé, on se met en studio quelques heures après, on se met derrière le clavier, on compose le truc et le soir on a la chanson. À aucun moment on s’est dit qu’on allait trop loin. Le truc nous a plu. C’était la magie d’un instant. On l’a laissé !
Tu as un regret sur cet album?
Pas du tout. Et ça je pense que c’est d’avoir pris le temps. Entre le début d’écriture et la sortie, il s’est passé trois années. On a eu le temps de se dire “ça bof, ça c’est bon !”. On a pris le temps de la réflexion, c’est sûr. C’est aussi la force d’être tout seul. Cela a été beaucoup plus simple de prendre des décisions seul, notamment pour l’écriture des clips, de la pochette. Moi qui ai vécu en collectif, cela a été tellement dur, mais à la fois tellement intéressant ! Mais pour choisir une pochette c’est un délire (Rires). Là, une simple discussion avec le label et c’est simple. Il n’y a rien que j’aurais fait différemment.
Tu dis donc que c’est plus simple de faire un album seul qu’à un nombre incalculable ?
Ah mais 1000 fois, ça n’a rien à voir ! C’est évident ! Ce n’est pas que c’est plus compliqué ou plus évident, c’est juste plus simple ! Dans la forme, c’est plus simple. J’avoue qu’en revanche dans le fond, ça m’a bousculé davantage de me livrer de parler vraiment de mon père, de mon grand-père. Cela a été plus dur émotionnellement.
Quelle est TA chanson phare de cet album ?
J’hésite toujours entre deux je crois, entre “Hyper” et “Prologue”. Je dirais “Hyper” car c’est vraiment la chanson qui résonne le plus chez les gens. Donc j’apprécie la magie du titre…
Qu’est-ce qu’on te souhaite pour après ?
Et bien la tournée, et c’est tout ! Là, j’ai pas du tout envie de me remettre la tête dans un album car c’était vraiment puissant, long. C’était super, mais là je me sens un peu vidé. J’avais 15 chansons un peu en gestation en moi, donc là c’est le moment où les gens les découvrent au fur et à mesure. Là, maintenant, c’est la tournée ! On va vraiment faire une belle mise en scène, de jolis arrangements etc. Et après j’aime bien aussi l’idée de ne pas savoir ce qu’il va se passer…
Découvrez l’album 15h22 de Sylvain Duthu :