Maude - © Anthony Ghnassia
Maude - © Anthony Ghnassia

Maude en interview : “J’ai commencé à écrire des chansons qui au final se sont assemblées et donnent cet EP”

Exclusivité aficia

C’est aujourd’hui, le 15 avril, que Maude dévoile son nouveau projet, l’EP Unfamous porté par les singles “Love Dies”, “Pas Normal” et “Sérieux”. Pour l’occasion, aficia a pu s’entretenir avec l’artiste…

Il y a huit ans, Maude rencontrait une ascension fulgurante avec son premier single “Love Is What You Make Of It”. Quelques mois plus tard sortait en toute logique #HoldUp, son premier album dont est notamment issu le tube “Rise Up”.

En septembre 2015, Maude enchainait avec un deuxième opus, Poparoïd. Durant toutes ses années, l’artiste n’a cessé d’être sous le feu des projecteurs : entre promo et concerts, Maude a vécu une période de forte médiatisation.

Après plusieurs années de recul, Maude revient en ce 15 avril avec Unfamous, son premier EP. À travers six pistes personnelles et intimistes, Maude se livre sur cette période qui, au final, n’a pas été exclusivement positive pour elle et vient boucler ce chapitre. Nous avons pu discuter avec elle de ces dernières années, de la création de son EP et de tout ce qui l’entour comme de son retour artistiquement plus libre…

Maude : l’interview…

Tout d’abord, c’est avec “Love Dies” que tu marquais ton retour il y a un an. Ce single s’est d’ailleurs montré assez déroutant pour certains. Est-ce que ces différents retours t’ont déstabilisé pour la suite, notamment pour la sortie de “Pas normal” en juillet dernier ?

Je m’y attendais plus ou moins quand même, même si c’est difficile d’avoir du recul sur ce que l’on fait parce que, au final, moi je fais de la musique comme j’ai envie de la faire, sans l’auto analyser constamment. Donc, en fait, il y a vraiment une partie de moi qui s’y attendait.

Aussi, ça faisait super longtemps que je n’avais rien sorti et mes nouveaux sons je les ai fait comme j’avais envie de les faire, pas forcément en pensant média, radio… Donc je savais que j’allais sortir quelque chose de différent, je m’attendais à avoir ces réactions là, des gens qui allaient me dire “mais wow ?!”, surtout pour “Love Dies” qui est pop mais qui est quand même un peu dark. Si la référence des gens qui écoutent ma musique c’était des “Rise Up” ou des sons style mon premier single, forcément ça allait faire un gap important. Et en même temps, pour le public qui suit ma musique depuis longtemps et qui a écouté mes albums et pas que mes singles, je savais que ça ne serait pas si choquant que ça.

Après “Love Dies” puis “Pas normal”, tu as dernièrement dévoilé “Sérieux”, le troisième extrait de ton EP. Tu as dit qu’il est l’un des titres que tu préfères parmi tout ton répertoire. En quoi sonne-t-il comme ton préféré ? Qu’est-ce qu’il a de plus ?

Il y a toujours une question de moment et il se trouve qu’en ce moment, ce titre me parle énormément ; par ce qu’il raconte, par ses sonorités, parce que je trouve qu’il est unique, il sonne comme rien d’autre en ce moment, c’est pour ça que je l’aime tant. C’est difficile d’expliquer pourquoi tu aimes particulièrement une chanson, quand je l’écoute, elle me fait un truc même si c’est ma chanson. Ça me le fait aussi avec d’autres musiques, tu sais quand tu as un gros kiffe parce qu’elle te parle, elle parle à tes tripes et “Sérieux” me fait ça. Et ça tombe bien parce que cette chanson c’est la mienne donc c’est cool.

C’est donc aujourd’hui, le 15 avril, que sort Unfamous, ton EP dans lequel tu évoques cette période d’extrême médiatisation que tu as finalement subi plutôt qu’apprécié. C’est d’ailleurs un projet qui sort presque huit ans jour pour jour après la sortie de ton premier single “Love Is What You Make Of It” qui est lui sorti le 16 avril 2013. Est-ce que Unfamous arrive à ce moment pour véritablement tourner la page de cette période ?

Oui ! En fait, c’est vraiment une boucle temporelle, ça va être huit ans après pile. Effectivement, l’EP parle de toute cette période là, ça retrace vraiment les huit dernières années et je pense que la musique, de toute façon, ça soigne, en tout cas pour moi qui mets vraiment ma vie dans mes textes. Il y a des artistes qui font ça super bien, ils écrivent des histoires qui ne les concernent pas forcément et qui vont raconter des choses qui sont dans leur tête. Moi, je raconte ma vie quand j’écris des chansons. Là, clairement, c’est quelque chose qui se termine, mais pas forcément dans le sens où ça veut dire que je ne ferrai plus jamais de musique mais simplement dans le sens que j’ai fait le tour de quelque chose, de cette période et de tout ce qu’elle m’a apporté, en bien ou en mal.

Alors oui, dans ma tête c’est un truc qui se ferme, qui se boucle parce que, quelle qu’en soit la suite de mon histoire dans la musique, elle sera vraiment différente.

Est-ce que y mettre des mots était indispensable pour que tu puisses clore cette partie de ta vie ?

Je ne l’ai pas fait consciemment, je ne me suis pas il y a quatre ans “tiens je vais faire un EP sur tout ce que j’ai vécu et sur les passages à vide”. J’ai commencé à écrire des chansons qui, au final, se sont assemblées et donnent cet EP, c’est en ça qu’il est vraiment spécial.

Il a été fait de manière très personnelle sans avoir pour but premier d’être mis en ligne. Ce n’est pas forcément des chansons que je pensais partager avec le public puis voilà, ça a fini par prendre tout son sens. Et oui, c’est important de mettre des mots sur les choses, je pense que ça aide à avancer, en tout cas c’est comme ça que je fonctionne.

Tu as fait le choix d’un EP, format plus court qu’un album. Est-ce que tu as fait ce choix afin de le construire comme une histoire que l’on aurait pu retrouver dans un ouvrage par exemple ?

Tout ce projet, je ne l’ai pas intellectualisé. En fait, quand j’ai regardé le matériel que j’avais un petit peu en me disant “j’ai cette chanson, celle-ci…”, je me suis moi-même rendu compte que ça parlait d’une période très particulière de ma vie et qu’il fallait que je les assemble parce que ça racontait quelque chose. Mais ça s’est vraiment fait super inconsciemment.

Le choix du format EP, c’est parce que j’avais suffisamment de chansons pour faire un EP. Je n’avais pas du tout envie d’en rajouter pour faire ce que l’on appelle du remplissage. Sur les albums, c’est un peu ce qui se fait des fois, surtout quand tu es signé en label. On va te demander d’écrire des singles et puis après on te laisse un peu placer des chansons qui te font plaisir histoire de remplir un album. Moi je déteste bosser comme ça, donc en fait, là, c’était l’essence de ce que j’avais à raconter et puis il se trouve que c’était un format EP.

Ce projet est donc un total renouveau pour toi puisque tu as en effet décidé de réaliser cet EP et tout ce qu’il l’entoure en totale indépendance. À quel moment t’es-tu sentie prête à vivre cette expérience ?

Je pense que je n’ai jamais été vraiment faite pour être dans un label, mais ça on ne peut pas le savoir avant de le vivre. Tu penses que tu as envie d’être en label mais quand tu y es, tu te rends compte que bof. Donc cette envie est venue assez rapidement. Après, effectivement, j’étais sous contrat pour deux albums… Alors j’ai simplement attendu qu’ils se terminent et puis je les ai récupérés à ce moment là. Mais l’envie d’être indé je l’ai depuis très longtemps. Après, il y a avoir envie et le faire, ce qui est un gros gap et je me suis lancée, parce que lorsque j’ai une idée en tête, je le fais !

De toute façon, en ce moment on voit beaucoup d’artiste dire au revoir aux labels et se lancer dans la grande aventure indé…

Oui, totalement ! C’est ce que je dis depuis des années, même à mes potes qui veulent être signés en label, je leur dis “mais pourquoi tu veux aller en label”. Mais c’est vrai que pour les jeunes artistes ça reste quelque chose d’extrêmement rassurant et c’est encore perçu comme étant un peu le Graal.

Quand t’es jeune artiste et que tu as signé, tu es tellement content, t’es là, tu sors le champagne et tout… puis au final tellement d’artistes déchantent vite. Et c’est pour ça que l’on voit de plus en plus d’artistes qui, après un ou deux albums, reprennent leur contrat puis montent leur structure, leur label, pour avoir plus d’indépendance. Au final, dans un label tu as un producteur, producteur c’est quelqu’un qui paye et quelqu’un qui paye, c’est quelqu’un qui commande.

Après tous ces changement et ton arrivée en tant qu’artiste indépendante, est-ce que tu te sens plus épanouie ?

Je me sens plus libre et ça, c’est vraiment quelque chose qui me faisait cruellement défaut quand j’étais en label. Alors, pour moi, c’est une découverte qui est incroyable, de me dire “Maude, tu peux faire ce que tu veux, il n’y a personne qui va venir, ou si ou ça”, c’est fou. Je ne sais pas si c’est forcément palpable quand on est pas dans ce métier, mais pour moi c’est un luxe de pouvoir me dire que je peux faire ce que je veux !

Après, c’est aussi très compliqué sur d’autres aspects. Lorsque tu bosses en indé tu dois endosser tellement de casquette à la fois qu’il y a plus de choses qui pèsent sur tes épaules, que ce soit financièrement, sur toutes les décisions à prendre, toutes les choses à gérer. Avant j’avais six personnes qui travaillaient pour moi, maintenant mon cercle est beaucoup plus restreint. Donc à la fois ça me fait beaucoup de bien puis à la fois c’est un dur apprentissage, mais franchement ça en vaut la peine.

Revenons maintenant sur les titres qui composent ton EP. Tu as donc présenté “Sérieux” pour lequel tu as collaboré avec Mosimann. Tu as aussi travaillé avec The Toxic Avenger, deux figures de la musique electro. Comment en es-tu venue à travailler avec ces artistes ?

Simon de The Toxic Avenger m’a été présenté par un ami en commun, mon ami Éric (Helmut Fritz) qui nous a mis en relation il y a un moment, franchement ça doit faire au moins cinq ans. The Toxic Avenger c’est un artiste que j’admire vraiment beaucoup. Il est tellement incroyable dans son approche de la musique, je ne sais pas comment l’expliquer mais quand tu fais une session avec lui, ça ressemble à une session avec personne d’autre. Il est là, avec ses synthés, il branche ses câbles multicolores partout, il y a vraiment ce côté expérimental dans la musique. Il va me sortir un petit objet, puis il va enregistrer le son, puis il va le retravailler, puis on va ajouter un effet et ça va donner quelque chose qu’on a jamais entendu. Et pour moi c’est incroyable parce que c’est vraiment un truc qui m’intéresse dans la musique alternative. J’étais vraiment contente de bosser avec lui et, en plus, c’est quelqu’un de tellement cool, qui ne se prend pas la tête, qui n’est jamais dans le jugement mais toujours dans le partage et tellement simple.

Quant à Mosimann, ça fait des années qu’on se croise, que ce soit sur des concerts ou évènements. C’est aussi quelqu’un qui travaille énormément avec mon mari pour son image donc voilà, c’est vrai qu’on a un cercle commun. Puis c’est pareil, ça faisait très longtemps qu’on se disait qu’il fallait qu’on fasse un truc ensemble et moi j’avais écrit “Sérieux” il y a un moment mais j’avais du mal à le composer, je ne sais pas pourquoi car généralement je le fais toujours moi-même. Alors je l’ai envoyé à Quentin en disant “écoute, si ça t’intéresse, si ça t’inspire, on la fait ensemble” et c’est ce qu’il s’est passé.

L’idée de cette prod lui est venue rapidement où il a fallu plus de temps ?

Quand je lui ai envoyé le texte, c’était l’année dernière en confinement, donc c’est vrai que cet EP a été fait de manière très particulière. Il a été produit dans une année de pandémie mondiale alors les artistes ont tous dû s’adapter et travailler différemment. Ce morceau a donc été fait sur plusieurs mois, on a pas mal travaillé à distance, on s’est fait une session tous les deux pour avancer un bon coup, mais finalement, ça s’est fait assez rapidement. C’est juste les complications liées au fait de ne pas pouvoir se déplacer, se réunir, qui ont ralenti le processus. Sinon, il a tout de suite trouvé la topline que je voulais et on a avancé sur l’univers ensemble et c’est super cool !

Tu évoques ce contexte assez particulier, il me semble d’ailleurs que tu as enregistré quelques morceaux dans ton garage non ?

Oui carrément… En fait presque tous les morceaux ! Les voix de “Love Dies”, je les avais enregistrées chez mon ami Damien Lauretta il y a longtemps et on a finalement gardé les voix originales, je ne les ai pas reposées. Sinon effectivement, tout le reste de l’EP, j’ai enregistré et édité mes voix toute seule. C’est marrant de le faire. Encore une fois, j’ai dû m’adapter à la crise sanitaire, je n’avais jamais bossé comme ça mais au final, c’était trop cool et au moins, tu es sûre d’avoir ce que tu veux.

En ce qui concerne le visuel de ce projet, notamment tes clips, tu travailles avec ton mari, Anthony Ghnassia. C’est plus facile pour toi de travailler en famille sur un projet si personnel qu’Unfamous

Complètement ! Il y a ce côté hyper personnel et c’était plus simple de le faire avec mon mari. Après c’est un vrai choix aussi, on adore travailler ensemble. Vraiment quoi ! Même si on se prend souvent la tête quand on travaille ensemble, sur la vision des choses, mais c’est complètement normal. J’admire le travail de mon mari. C’est avant tout un kiffe, limite un bonheur. Et il ne faut pas oublier qu’il a photographié un peu les plus grands artistes de la planète. Donc faire partie de la liste, j’ai beaucoup de chance ! On est vraiment un couple qui s’auto-inspire, on a cette chance de se compléter.

Sans surprise, c’est aussi lui qui signe la pochette de l’EP. Sur l’image, tu apparais seule sur un arbre qui semble très haut, y-a-t-il une symbolique particulière ?

Maude - Unfamous

En effet, je voulais une pochette pour Unfamous qui était à la fois décalée et à la fois premier degré. Parce qu’elle est un peu premier degré cette pochette. La meuf sur un arbre avec cette grosse robe, il y a un truc qui interpelle un peu, tu vas te demander pendant dix secondes si tu trouves ça stylé ou kitch. C’est exactement ce que je voulais comme réaction.

Pour la symbolique, c’est vraiment ce côté de l’artiste qui rentre chez elle avec sa robe de bal parce qu’elle est au bout, qui quitte la soirée avant la fin, elle a un besoin vital de se percher dans un endroit où il n’y a personne. C’était un peu mon ressenti quand j’ai décidé de ralentir mes activités il y a quelques années de ça.

Pour finir cette entrevue, toi qui dis souvent que la meilleure promo pour un artiste c’est le public qui partage son art, est-ce que tu aurais un artiste à nous faire découvrir ?

Il y a un jeune artiste qui s’appelle Susanoô, il vient justement de sortir son EP et c’est franchement c’est trop bien. C’est un artiste complètement urbain, très intéressant. C’est un musicien hors pair qui a l’oreille absolue, c’est à dire que tu lui donnes n’importe quel instrument, il sait en jouer, il fait partie de ces gens qui ont le don de la musique. Il écrit pour lui, pour d’autres… J’invite vraiment tout le monde à aller l’écouter, le soutenir et puis aller voir son premier clip qui a été réalisé par mon mari, un clip donc je suis très jalouse car il est fou !

Découvrez UNFAMOUS de Maude :