Girls in Hawaii en interview : « Notre plus grande peur, c’est de se répéter »

Girls in Hawaii
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De passage en France pour quelques concerts, Daniel Offermann, le bassiste de Girls in Hawaii, a pris le temps de répondre à nos questions. De la collaboration avec Luuk Cox à la scène musicale belge du moment… Confidences !

Avec son dernier album, Nocturne (2017), Girls in Hawaii a proposé des chansons mêlant les influences et concrétisant la transition vers l’electro engagée sur Everest sorti quatre ans plus tôt.

Alors que nous avons pu assister au concert des Belges à Caluire, nous avons aussi eu la chance d’échanger avec le bassiste, Daniel Offermann, qui nous a parlé du processus de création, le remix de Lost Frequencies et de la scène…

Girls in Hawaii !

Salut Daniel ! Lorsque l’on écoute vos deux derniers albums, Everest et Nocturne, on sent que l’un des points communs c’est l’utilisation de plus en plus importante de sonorités electro. Le groupe a-t-il senti le besoin de se tourner vers ce genre de musique pour évoluer ?

C’est clair que nous avons essayé de travailler une couleur musicale qui nous intéresse beaucoup et que nous retrouvons aussi dans ce que nous écoutons tous les jours. Nous avons toujours tenté de faire de la musique pop basée sur des ‘chansons chantables’ en essayant des arrangements moins classiques, moins attendus. À partir d’un moment, nous nous sommes tournés vers des sonorités plus froides. Cela étant dit et pour contrebalancer ça, pour Everest, nous avions fait une tournée en acoustique.

Ce qui nous intéresse depuis que nous jouons ensemble, c’est trouver d’autres manières de jouer nos morceaux. Des façons plus adaptées à ce que nous écoutons aujourd’hui. L’ambiance que nous avons, c’est de chercher des couleurs qui sont peut-être moins attendues pour un groupe pop-indé même si nous savons que parfois ça demande à nos fans de nous suivre dans ces aventures. Nous avons la chance d’avoir un public assez fidèle qui n’écoute pas non plus les mêmes musiques qu’il y a 20 ans. Notre plus grande peur, c’est de se répéter, d’être un groupe qui fait des reprises de lui-même.

L’un des autres points communs c’est le travail avec le producteur Lukk Cox. Cela a-t-il été une évidence de travailler à nouveau avec lui ?

C’est intéressant parce que Lukk vient de la musique electro. Pour Everest, c’était vraiment un choix pour lequel nous ne savions pas ce que ça allait donner. Finalement, ça a marché ! Girls in Hawaii est un groupe qui aime bien avoir des relations à long terme. Pour te donner un exemple, nous sommes toujours sur le même petit label en Belgique et nous avons toujours le même manager. Avec Luuk, ça s’est passé de cette manière aussi. Nous avions aussi évoqué la possibilité de travailler avec un autre producteur mais nous avions surtout envie de pousser plus loin l’idée d’Everest, de cet univers sonore et de chercher jusqu’où nous pouvions aller tout en gardant notre ADN.

Au sein du groupe, c’est Antoine et Lionel qui s’occupent de la création de vos chansons. Peux-tu nous parler du processus de création de Girls in Hawaii ?

C’est vraiment un drôle de binôme ! (Rires) Ils ont des univers assez complémentaires mais d’un autre côté ils ont quand même besoin l’un de l’autre pour créer. Après chaque tournée, chacun rentre chez soi, c’est à ce moment qu’ils commencent à faire leurs petites démos et après ils nous les font écouter pour que nous puissions donner notre avis. Parfois, il y a de très bons morceaux qui ne rentrent pas forcément dans le contexte de l’album. C’est aussi ça qui est intéressant. C’est l’expérience d’une bande de potes qui fait de la musique depuis 15 ans. Avant de rentrer en studio, nous faisons des bonnes cessions d’écoute en donnant nos avis et nos suggestions. Chacun à son avis donc ça part un peu dans tous les sens. C’est un vrai challenge d’arriver à la fin avec un album complet qui a un fil rouge. Nous restons attachés à un album qui a une certaine organisation avec un début, un milieu et une fin et pas seulement une compilation de morceaux collés les uns derrière les autres.

Le groupe est né à une époque où la scène belge était florissante. Ces derniers temps on voit pas mal d’artistes originaire de Belgique comme Roméo Elvis, Caballero ou encore Angèle avoir du succès en France. Quel regard portes-tu sur ce renouveau musical qui s’exporte plutôt bien ?

Cette situation me fait penser à ce que nous avons pu vivre à nos débuts avec tous les groupes indé qui débarquaient. Musicalement, c’est tout à fait autre chose mais je pense que dans la manière de communiquer, de ne pas trop se prendre au sérieux ça se rapproche de nous. J’avoue que je ne m’y retrouve pas non plus à 100%. Il y a comme un esprit d’équipe.

D’ailleurs, l’année dernière, votre compatriote Lost Frequencencies a remixé « Guinea Pig », est-ce que c’est une idée qui venait de votre part ou de la sienne ? Comment ce remix est-il né ?

Il vient d’un petit village pas très éloigné de celui d’Antoine et un jour il nous a contacté en nous disant que quand il était jeune, il écoutait notre musique. C’est vraiment lui qui est venu vers nous, qui nous a proposé de faire un remix. Tout comme Luuk, c’est un univers totalement différent du notre mais le contact était chouette. Je pense qu’avec le temps, nos bases sont devenues stables et que nous pouvons nous permettre ce genre d’expérience. Nous ne l’aurions sûrement jamais fait il y a 15 ans. C’est intéressant de rencontrer des artistes plus jeunes. Ça ne marche pas forcément tout le temps mais c’est très important de rester curieux et ouverts par rapport à ce qui se fait dans la musique. Dernièrement, nous avons eu un remix de la part de Dan Lacksman qui est l’anti-thèse de Lost Frequencies.

Découvrez le remix de « Guinea Pig » par Lost Frequencies :

Après la grande tournée qui a suivi la sortie d’Everest, vous avez fait le choix de repartir pour des concerts en acoustique dans des plus petites salles. Était-ce un besoin pour le groupe de vous retrouver en plus petit comité, de vous recentrer sur l’essence même de votre musique ?

Ce qui a été sympa avec cette tournée acoustique, c’est que nous l’avons fait dans l’urgence. Nous avons répété deux, trois semaines avant. Nous avons enregistré l’album live lors des premiers concerts. Nous cherchions vraiment à nous mettre en danger, d’avoir une certaine fragilité. Après la centaine de dates de la tournée d’Everest, nous sommes tombés dans une sorte de routine. Nous avions envie de retrouver cette sensation d’entendre les autres jouer quand nous étions sur scène, que nous sentions que les instruments pouvaient casser à tout moment. C’était une façon assez ludique de redécouvrir notre musique. Entre nous, nous l’appelions la ‘tournée brocante’. Quand nous jouons dans des petites salles, ça nous permet aussi de ne pas trop se soucier au niveau de la technique. Finalement, nous étions à la base de ce que nous recherchons quand nous faisons de la musique ensemble.

Pour terminer, as-tu un souvenir d’un concert qui t’as marqué ?

Oh c’est dur à dire ! Les concerts sur les grandes scènes passent tellement vite que c’est difficile d’en profiter vraiment. Les dates qui restent vraiment souvent les petites durant lesquelles tu fais des rencontres avec des fans qui nous expliquent que telle ou telle chanson a été importante pour eux à un certain moment de leur vie.

Le concert qui m’a quand même bien marqué, c’est quand nous avons fait notre retour après la mort de Denis. Après ce drame, le groupe a vraiment failli s’arrêter. Nous n’avions plus le temps et l’énergie de faire un album. Nous avions présenté Everest pour la première fois durant un festival en Belgique. Nous n’avons pas spécialement bien joué mais il y avait une émotion, une énergie, un vent sur scène que j’ai retenu jusqu’à aujourd’hui. Nous ne savions vraiment pas à quoi nous attendre, si les gens s’intéressaient encore à nous. Dans mon souvenir, c’était une date très spéciale car il y avait une belle énergie entre le public, le ciel, la terre et nous…