Petit Biscuit - © Jonathan Bertin
Petit Biscuit - © Jonathan Bertin

Petit Biscuit en interview : “Diplo est quelqu’un qui vit musique, ça s’entend et ça se ressent, il m’a filé de bons conseils”

Dernière partie d’interview avec Petit Biscuit dans le cadre de notre rendez-vous “Une Semaine avec…”. Comment ne pas parler de son nouvel album Parachute. C’est à lire sur aficia. 

C’est un événement ! Petit Biscuit est de retour avec l’album Parachute, l’album de la confirmation, quatre ans après Presence qui a vu naître le tube “Sunset Lover” dont on parlera. Ce nouvel album, c’est un véritable virage artistique pour l’artiste, comme vous avez pu vous en apercevoir avec les premiers extraits dévoilés (“I Leave Again” ou “Burnin”). À cette occasion, on vous propose de passer “Une semaine avec…” Petit Biscuit pour tout savoir sur lui et ses habitudes de vie.

Parachute, l’album de la chute libre !

Troisième et dernière partie d’interview, nous avons interrogé Petit Biscuit sur la confection de son nouveau disque, sur le nom donné à son nouvel album, sa collaboration avec Diplo mais aussi ses débuts avec “Sunset Lover” dont il est particulièrement fier. Tout ça et bien plus dans notre interview ! 

Petit Biscuit… l’interview

Afin de mieux comprendre l’histoire de ton nouveau disque, peux-tu m’expliquer le sens donné au titre, Parachute ? 

Par habitude, on associe le parachute à la pratique sportive. Moi, je voyais plus ce moment où tu sautes en parachute, tu as ce moment de chute libre, puis après tu déclenches le parachute et tu es poussé vers le haut. Tu prends de la hauteur quelque part. Et ça, ça reflète exactement ce que j’ai vécu ces derniers temps. Lors de ma première tournée, j’ai eu la chance de jouer pour les Inouï, c’était l’un de mes premiers concerts. J’ai bossé pendant trois jours non stop pour préparer au mieux ce live qui durait que trente minutes. C’était traumatisant pour moi. J’en ai fait des cauchemars pendant longtemps. C’est à ce moment-là que j’ai pris l’avion, j’ai sauté et je me suis senti partir en chute libre jusqu’en novembre 2018, vraiment quand j’ai arrêté la tournée. J’ai vécu des grands moments.

Entre excitation et folie c’est ça ?

À la fois c’était fou, excitant, mais à la fois traumatisant pour moi en effet. Je me rappelle être rentré de tournée malade pendant quelques semaines. J’avais accumulé beaucoup de fatigues, de pressions. Je minimisais un peu. Je me disais que cette pression était dans ma tête, qu’elle n’existait pas, alors qu’en fait, j’ai le droit d’être légitime de ça. Ce sont ces voyages dont on parlait tout à l’heure (dans la précédente interview, ndlr) qui m’ont impliquées à la composition du deuxième album, de prendre de la hauteur et de déclencher le fameux parachute. 

On te surnomme souvent comme l’auteur du tube “Sunset Lover”. À travers ce nouvel album, as-tu essayé de faire en sorte qu’on se détache de ce titre-là ? 

Comment dire ? Honnêtement, je n’ai pas du tout réfléchi à ça et je préfère ne pas me poser cette question. Je suis très fier de “Sunset Lover” et je suis très content de l’avoir fait pour plusieurs choses. La première c’est qu’il a lancé ma carrière. La deuxième c’est que les gens en live sont fous sur ce morceau. Et la troisième c’est que, je ne le cache pas, c’est que financièrement, cela m’a permis de faire de la musique à plein temps et d’investir de l’argent dans des projets que je kiffe comme la réalisation de clips, tout en restant indépendant. Avec “Sunset Lover”, je me suis fait de l’argent, et je n’ai pas eu besoin de signer en label pour investir dans des clips ou quoi que ce soit. C’est une vraie aubaine aujourd’hui. Après tu vois, je suis passé à autre chose, je fais du son, je chante dessus… Je n’ai plus envie que ma musique ressemble à ce que je faisais en 2016. J’ai envie de me voir évoluer, c’est normal. Si j’avais continué dans la veine de “Sunset Lover”, ça m’aurait dégouté. J’en connais des artistes qui continue de faire ce qu’ils ont toujours fait, et c’est devenu compliqué pour eux. 

Si l’on compare ton premier album et Parachute, peut-on parler de virage artistique ?

Je pense que toute ma carrière est un virage artistique ! (Sourire) Aucun son ne ressemble à un autre de toute manière. Il y a souvent des points communs, c’est sûr. Là où on peut dire qu’il y a un vrai virage en revanche, c’est au niveau du songwriting. C’est moi qui écris désormais, chose que je ne faisais pas avant. J’étais simplement compositeur producteur auparavant alors qu’aujourd’hui je suis chanteur, songwriter et c’est une discipline que je possède en plus. 

Cumuler les disciplines comme tu le fais, est-ce que cela te demande plus d’énergie et plus de temps pour concevoir ton album, ou au contraire, cela facilite le travail ?

Je dirais que c’est une question d’organisation, ça se divise. C’est simplement que je ne compose plus de la même manière. Aujourd’hui, je crée d’abord mes mélodies, mais je sais que ma voix va venir sublimer ça. Je ne compose plus de la même manière, c’est certain. 

D’ailleurs, ta voix est-elle naturelle ?

Elle est naturelle, mais aujourd’hui, qu’est-ce qu’une voix modifiée et trafiquée ? Qui est-ce qui ne modifie pas un peu sa voix sur logiciel ? Bonne question ! En vrai, je la considère naturelle. Je ne me mets pas d’auto-tunes par exemple. 

Comment as-tu procédé pour passer à l’artiste qui ne chantait pas à un à véritable chanteur ? 

Je me suis beaucoup entraîné depuis quelques années. Alors comme tout le monde, j’ai commencé sous la douche et puis après on se dit qu’on est un chanteur pourri. J’ai tenté de m’enregistrer des trucs, j’ai longtemps détesté ma voix. Et puis, je me suis dit que le mieux était quand même lorsqu’elle était naturelle. C’est celle qui ressemble le plus à ma voix parlée. Alors, pas dans la hauteur des notes, mais dans ce côté un peu nasal. C’est ce que je retiens aujourd’hui, celle d’aller dans la direction de la voix que je connais. Cela ne sert à rien de chercher une voix qui ne nous ressemble pas. 

Finalement, avec Parachute, cherches-tu à attirer un nouveau public ou à garder l’ancien ? 

Je pense qu’avec cet album, je ne vais pas forcément fidéliser le public que j’ai acquis. En fait, j’espère toujours qu’une partie restera ouvert à entendre différents styles, mais le peu que j’ai vu dans les commentaires depuis la sortie des premiers singles, c’est que les gens sont un peu aliénés par ce virage artistique. Après, il y a une grande partie du public qui kiffe vraiment. Ca dépend d’une personne à l’autre. Il y a une question d’ouverture d’esprit, c’est sûr. C’est un peu le syndrome du moment avec un bon nombre d’artistes finalement. Les gens trouvent tellement de confort dans une espèce d’ADN éphémère d’un artiste que dès qu’il va essayer d’explorer autre chose, ce qu’il fera forcément, ils vont prendre peur et être déçus en mode “C’était mieux avant”. Sauf qu’un artiste est obligé d’évoluer et d’explorer d’autres courants musicaux.

Tu fais partie de ceux qui pensent qu’il faut savoir se remettre en question ?

C’est certain que celui qui reste tanquer dans ce qu’il fait finira par se faire mordre la queue. Le public a du mal à se laisser porter par de nouvelles choses. Mais je peux également toucher un public qui n’était pas forcément fan de ce que je faisais avant et qui appréciera ce que je fait plus récemment. Je trouve ça intéressant aussi. Moi-même, il y a des groupes que j’aimais pas forcément avant ou dont je n’ai pas forcément prêté beaucoup d’attention que je finis par apprécier avec le temps. 

Le public est-il devenu trop dur avec les multiples propositions ?

Je pense que c’est l’industrie du disque qui est faite comme ça aujourd’hui. Le fait qu’il y ait trop de choix… C’est compliqué pour les gens d’avoir trop de choix (Rires). Par conséquent, ils vont s’accrocher à ce qu’ils connaissent déjà. 

J’aimerais parler avec toi de ta collab’ avec Diplo membre du groupe Major Lazer. Il a composé pour Madonna, Usher, Sia….. Comment fait-on pour bosser avec un tel artiste ? 

C’est marrant parce qu’il m’a tout simplement envoyer un message privée sur Instagram pendant que j’étais en Islande, pour me demander si on pouvait se caler une session quand je passerai à Los Angeles. Par chance, j’avais prévu d’aller faire un tour là-bas juste après l’Islande. Donc je suis allé chez lui, on a écouté plein de sons, on a fait un peu de musique, puis il y a eu ce rythme guitare. Tout est parti de là. Après cette session de studio, on a conçu plein de rythmes différents chacun de son côté, et on s’est revu à Paris un peu après, juste avant le confinement. On est arrivé avec un son un peu tribal. Parmi les collaborations que j’ai faites, c’est peut-être le mec que j’ai le plus vu en studio.

Ça parait surréaliste car c’est un artiste très demandé et finalement, il t’a prêté beaucoup d’attention…

Tout à fait. C’est dingue parce que c’est celui que j’étais censé le moins voir à cause de la distance. Parfois, tu t’attends à des choses, j’avais peur qu’il soit surbooké, et finalement pas du tout. Il a un bon œil, c’est quelqu’un qui vit musique, ça s’entend et ça se ressent, il m’a filé de bons conseils, il est très lucide. À la fois il m’a bien aidé et en même temps il m’a laissé beaucoup de liberté, peut-être parce que c’était pour mon album aussi peut-être…

On a pas l’habitude de t’entendre sur des sonorités tribal. Est-ce que lui comme toi avez-vous pu vous retrouver dans un même morceau ? 

Je pense ! En l’écoutant, je pense qu’il y a un bon équilibre entre les sonorités artistiques de chacun, on sent qu’il y a ce côté Diplo dedans. La voix qui figure sur ce morceau d’ailleurs pourrait très bien être assimilée à un morceau du groupe Major Lazer dont tu parlais tout à l’heure ou à un Diplo. C’est lui-même qui m’a soumis le choix de voix, c’est dire à quel point il s’est investi dans le morceau.

Quel argument donnerais-tu au public pour qu’il écoute ton nouveau disque ? 

Je suis très mauvais pour vendre un produit ! (Rires) J’ai envie de te dire que si l’interview leur a plus, et je pense que s’ils sont arrivés jusqu’ici c’est le cas, alors allez écouter Parachute