Monsieur NOV pour aficia
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Monsieur NOV en interview ‘Flash’ : “Je voulais que chaque titre de l’album ait sa propre histoire”

Après quinze années de carrière, Monsieur NOV marque son grand retour sur son nouvel album Love Therapy. Avec sa classe habituelle, sa voix envoûtante et ses sonorités intenses, l’incontournable du R&B français livre les dessous d’une rupture amoureuse en passant par toutes ses phases émotionnelles. aficia l’a rencontré !

1. Trois ans se sont écoulées entre ton dernier album et la sortie du nouveau, Love Therapy. Qu’as-tu fais pendant ces trois années ?

En 2021 il y a eu la naissance de ma fille, j’avais la tête dans les couches. (Rires) Donc c’était beaucoup de jonglerie entre vie familiale et vie artistique finalement. Mais dans tous les cas, même s’il n’y avait pas eu d’évènement particulier comme la naissance de ma fille, l’élaboration d’un album à proprement parlé c’est toujours plus long que l’élaboration d’un simple EP. Sur un EP tu peux faire les meilleurs titres du monde sous une forme de compilation et tu mets tout dans l’EP.

Tandis que pour l’album c’est une réflexion tout autre, c’est une cohérence entre les titres, entre les différents thèmes mais aussi dans la couleur, c’est aussi réussir à trouver ce fil conducteur… Forcément tout cela met plus de temps à créer, à trouver. Il y a tout un univers que l’on a voulu créer et ce qui était difficile c’est que, souvent dans les projets un peu conceptuels type « storytelling » avec une narration forte, tu es obligé d’écouter de la piste 1 à la dernière piste pour comprendre. Hors moi je ne voulais pas rentrer dans ce piège là, je voulais que chaque titre ait sa propre histoire, sa propre identité afin que chaque titre soit indépendant de la trame pour que l’on puisse écouter librement les titres sans être perdu dans la narration. Mais, en même temps, j’ai voulu qu’il y ait cette espèce de trame en fond, qui fait que lorsque tu écoutes du premier titre jusqu’au dernier tu te dis « ah oui ça raconte quelque chose de A à Z », grâce notamment aux interludes…

Et quand je te dis notamment qu’un album est long dans sa construction, il y a un morceau qui le symbolise très bien dans l’album : « Ne m’oublie pas ». On a mis beaucoup de temps à faire ce titre-là, entre la première maquette et la version définitive il y a eu beaucoup d’aller-retour, de changements parce-que tu peux aussi avoir de beaux accords, un thème et de belles mélodies mais pour finaliser un morceau c’est pas seulement ça… C’est aussi, « comment tu vas faire rentrer le beat ? », « comment tu vas laisser respirer la prod ? », « est-ce que le beat est en accord avec les accords ? ».
Et une fois le morceau terminé, on se demande « est-il pertinent parmi tous les autres de l’album ? » et celui-ci est un morceau que nous avons pris énormément de temps à faire.

Monsieur NOV sera au Trianon en avril prochain

2. Peux-tu nous parler d’ailleurs de la construction de Love Therapy, de la manière dont tu as imaginé ton album ?

Au premier abord il n’y avait pas de réflexion particulière, c’était surtout du studio et de la création instinctive, donc aller au studio, faire de la musique simplement. Il n’y avait pas encore de direction ni de trame. Et au bout d’un certain nombre de titres enregistrés, ça nous permettait d’avoir un premier squelette, qui nous permettait ensuite de se projeter sur le nombre de titres que l’on souhaitait pour l’album, sur quelle thématique, sur quelle atmosphère.

Ensuite, à partir de ce premier squelette, on a enregistré de nouveaux titres qui, dans le processus, avaient une dynamique d’album. Une fois ces nouveaux titres enregistrés, dans un second temps ça nous permettait d’avoir un deuxième squelette un peu plus volumineux en terme de morceaux. On pouvait se retrouver avec 15-20 sons et cette base là « définitive » nous permettait de savoir exactement dans quelle direction aller, dans les thématiques, le storytelling, dans la texture aussi, dans les arrangements…

Et une fois ce cadre définit grâce à ce deuxième squelette vient la troisième phase on va dire, la phase de finalisation, la phase de réarrangement, de finition et de décantation sur tous les sons que l’on a et sur ceux qui sont arrivés en route. On décante et on sélectionne les sons les plus pertinents en rapport avec la thématique trouvée.

3. Parlons du titre « Dernier je t’aime » en featuring avec Josman. Comment est-ce que tu décrirais ce titre, ses enjeux, ses couleurs ? Et pourquoi avoir fait le choix de choisir ce morceau pour ouvrir et présenter l’album ?

À la base moi j’écoute énormément ce que fait Josman et lorsque je l’ai invité en studio je m’étais fait en avance une idée du titre qu’on allait faire, la direction que nous allions prendre pour ce morceau. Le jour du studio, quand il est arrivé je lui ai expliqué un peu le truc, je lui ai fait écouté deux à trois instrus. Et, en fait, Josman me dit qu’il ne veut pas partir sur quelque chose de trop pêchu, de trop rap, il voulait « faire du NOV », un titre bien mielleux, bien musical où ça chante, ça parle d’amour. Ca m’a surpris sur le moment et du coup on est partis de zéro. D’habitude quand j’arrive en studio avec les invités, il y a toujours une topline, une maquette qui traîne, une instru sauf que là on avait vraiment rien.

Alors on a créé en partant de rien, les accords, le beat, l’idée du thème et tout s’est brodé autour des premiers lyrics, des premières mélodies.

Et pourquoi avoir décidé d’ouvrir l’album avec ce titre-là ? Bien qu’officiellement ce soit le deuxième single puisque le premier single de l’album reste « Love Therapy », la track numéro 2, c’était plus un « single zéro » comme je l’appellerais, pour instaurer le contexte de l’album, le fait que tout part de cette fameuse rupture. « Dernier je t’aime » le titre clippé avec Josman, est effectivement le vrai premier single de l’album et on l’a balancé parce-que le thème était cohérent par rapport à ce storytelling.
Après la rupture, avant d’avancer, passer à autre chose et se mettre avec quelqu’un éventuellement, on est toujours poursuivit au quotidien par les souvenirs, les fantômes de son ex… et le dernier je t’aime symbolise ça.

Et on voulait aussi ce titre parce qu’on avait pas annoncé la tracklist de l’album à ce moment-là encore et inviter un artiste comme Josman permettait de créer la surprise, de part la connexion RnB/Rap et de part le statut de Josman, ça permettait de dire que sur cet album on allait être sur du « gros feat », du gros banger. C’était ça l’idée.

Découvrez « Dernier je t’aime » de Monsieur NOV et Josman :

4. Tu as invité Tayc sur ton album. Pour les puristes/fans de RnB c’est la connexion la plus attendue et contrairement à votre première collaboration dansante sur l’album de Tayc, vous êtes partis cette fois sur un slow jam, du pure RnB, peux-tu nous parler de ce choix et de cette collaboration ?

On était partis à la base sur quelque chose de plus dansant, plus dans son style Afro à lui pourtant. Au début ça s’est fait assez instinctivement car au studio j’aime bien demander aux artistes que j’invite d’apporter leur touche puisque c’est ça qui fait que j’écoute et que j’apprécie leur musique. Alors quand ils viennent j’ai envie davantage qu’ils apportent leur touche à eux.

Mais après coup, après avoir enregistré ce premier morceau, on s’est dit « mais les gens quand ils pensent à NOV et Tayc ils pensent pas à ce genre de titre, ils pensent à du RnB pur et dur, à du classique ». Souvent d’ailleurs, les artistes américains RnB quand ils font des titres entre eux c’est souvent un peu claqué parce qu’ils sont généralement trop dans la réflexion de faire un hit, d’être dans une démarche de single de tube et ça gâche un peu le côté instinctif et naturel du truc. Et on s’est dit que justement avec ce premier titre enregistré, peut être qu’on est rentré dans ce piège sans le savoir.

Alors Tayc et moi nous sommes retournés en studio avec l’envie de faire du naturel. On part alors sur un slow jam, un classique RnB et inconsciemment je pense que les gens, lorsqu’ils pensent à Monsieur NOV et Tayc, c’est vraiment ce style de titre qui ressort dans leurs têtes. Et effectivement on a pas eu tort parce-que dans les chiffres de streaming on voit bien que c’est l’un des morceaux préférés de l’album.

Découvrez « Ma femme » de Monsieur NOV et Tayc :

5. J’aimerais connaître ton avis sur le « retour » en force du R&B dans le monde et notamment en France, même si c’est un peu plus timide désormais. Comment vois-tu cette évolution de ton côté, toi qui est dans le game du RnB depuis plus d’une décennie maintenant ?

J’ai ressenti comme une nouvelle perception des gens sur le RnB, en France, à partir de 2020. Je ne sais pas ce qu’il s’est passé exactement, peut-être que des artistes comme Dadju, comme Tayc ou encore Joé Dwèt Filé, ces artistes à voix, ces chanteurs à mélodies ont probablement démocratisé ce genre. Même si eux, fondamentalement, ce n’est pas du RnB pur et dur, mais sont dans les codes en tout cas du mec qui chante l’amour, qui a de la mélodie.

Et encore en 2020 ça restait encore assez timide en France, mais depuis cette période-là ça ne fait qu’aller dans le bon sens il faut le dire. Je pense aussi que les gens n’ont plus ce complexe qu’il y avait ces dix dernières années où quand tu chantais l’amour, les relations tu étais catalogué comme un loveur ou un chanteur fragile. Aujourd’hui, ce n’est plus du tout le cas. Je pense que c’est une forme d’alignement des planètes lié notamment aussi à toute cette nouvelle vague d’artistes américains (Bryson Tiller, PartyNextDoor, Giveon… ndlr). Il y a dix ans quand les musiques elles sortaient aux États-Unis, il y avait un moment de latence avant l’arrivée en France tandis que de nos jours quand le projet sort en Amérique, il sort en France dans le même temps, ce qui nous permet de nous manger en live tout ce qu’il se passe là-bas. Je pense que ça a influencé l’oreille des auditeurs français.

Sans oublier les rappeurs aussi qui, ces dernières années, ont beaucoup capitalisé dans leurs singles et dans leurs tubes autour des titres qui parlent de meufs, de relations et ça a désacralisé ce truc de l’amour, dans la musique urbaine.

Et moi vu que ça fait 10 ans que je suis dans ce créneau-là et que je n’ai pas changé de créneau car c’est ce que je sais faire de mieux, aujourd’hui les portes s’ouvrent et c’est une aubaine pour moi. Les gens qui me suivent depuis le début ils se disent « super, enfin son moment » et les nouveaux auditeurs qui ne connaissaient pas il se disent « j’ai découvert un artiste là, c’est frais » et ils se le mangent sans apriori, sans arrière pensée tandis qu’il y a 5 ans, ces gens-là qui découvraient NOV ils étaient entre-deux en mode « ouais j’aime bien mais ça parle trop d’amour »… Je me rappelle quand je sortais mes projets avant, à chaque fois en interview on me demandait « pourquoi dans ton album on parle exclusivement ou presque que d’amour ? » alors que c’est naturel dans ce style là, toi-même tu sais que dans le RnB on ne pose pas cette question-là, on te demande pas « pourquoi tu fais pas de son sur l’inflation ? ». Non ! Dans le RnB on te demande pas d’être militant, on te demande juste de chanter mais en France il y avait ce truc-là oui.

Découvrez le nouvel album Love Therapy de Monsieur NOV :